Défilés Automne/Hiver 2022/2023
Par
Yann Gabin pour PlaneteMode.com
 
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Balenciaga Automne/Hiver 2022/2023 par Demna Gvasalia
Balenciaga 360° Show Winter 22 Collection. Avant de débuter sa présentation Automne/Hiver 2022/2023, la voix de Demna Gvasalia, grave et sérieuse, s'exprime sur le début de guerre en Ukraine. En ukrainien, il dénonce cette ineptie humaine. Lui, qui a connu les ravages de la guerre lors de son enfance, ne pouvait rester insensible face aux exactions russes, localisées à moins de 2000 kilomètres de Paris. Optimiste, il prie pour tous les peuples oppressés et, particulièrement ceux dont les vies demeurent déjà brisés à la frontière de l'Europe. Un énorme cercle couvert de neige fait office de set design pour ce défilé Balenciaga. Telle une arène, les invités se discernent furtivement derrière une vitre à 360°. Comme s'ils étaient derrière la paroi d'un zoo. Voyeurisme. Voir sans être vu. Une allégorie de l'écran. Le carton d'invitation, originale une fois de plus, s'incarne dans un I-Phone brisé et gravé à la date de présentation. Un cirque contemporain ou l'on patiente avec délectation pour observer bien confortablement le spectacle de la vie. Un décor glacial et frileux ne laissant rien présager de bon. Quelques flocons de neige dégringolent avec parcimonie. Un souffle léger les balance doucement jusqu'au sol gelé qui ne sera certainement pas commode à fouler. Ce paysage mortifère dégage un sentiment de catastrophe imminente. La luminosité baisse. Un brouillard aérien se propage. La première silhouette s'envole dans un vent offensif. Robe noire chauve-souris "sauve qui peut", lunette sombre "œil de mouche" et sac poubelle en cuir. C'est sombre. Non pas la mode de Demna Gvasalia mais le Mood. On s'échappe, on fuit, on se réfugie. On devient réfugié. Le jeune garçon enfile un bustier/pantalon mazout. Peut-être n'a-t-il pas eu le temps de trouver autre chose avant de décamper. Les silhouettes demeurent sur l'ensemble du show d'une profonde noirceur. Ces dernières sont maigrichonnes et décharnées. Voire effrayantes. Mais la guerre est un monstre. La combinaison en cuir verni se fait deuxième peau. Si l'on est un temps soit peu mince, l'allure offre une vision frôlant l'anorexie. Agrémentée de bottes talons aiguilles acuminées pour cheminer dans la neige, l'image en est presque burlesque. La version rouge sang ne promulgue pas un désir de bien être. Le pompon s'incarnant dans la version momie/scotch dont le duo "colorielle" me remémore celui du ticket de métro des années 80. Siglé Balenciaga bien entendu. Les looks anthracite se suivent et se ressemblent vaguement. Souvent avec un sac poubelle à la main. Les garçons enfilent des bottes à talons aiguilles, dont la configuration s'évase aux genoux tel un château d'eau. Comment dire ? Si l'esprit demeure ouvert, on notera un certain avant-gardisme. Si ce dernier l'est beaucoup moins, on rétorquera que l'on ne saisit rien à la mode. Que l'on parait dépassé, ringard, suranné. Bref, la rue en décidera. Pour débriefer : les hommes sont des femmes qui sont des hommes qui sont des femmes. Les vêtements appartiennent à tous. La veste en cuir demeure toujours over size. Un grand classique de la maison. Totalement surdimensionnée. C'est l'abstraction du corps. Ses proportions demeurent effacées pour faire place à une conformation éthérée. Toutefois, quelques looks, à l'allure classique, redonnent espoir. Col roulé cachemire, jupe tournoyante, robe seconde peau en laine mettent en valeur le nouveau sac de la marque : le Hourglass. Bella Hadid traverse le champ de vision avec une robe enveloppante avec effet trompe l'œil. La surimpression d'une robe dentelle, sans manches, sur un tissu élasthanne neigeux en fera l'un des hits auprès de la presse. Une seconde robe réitère les imprimés fleuris, aux tonalités mandarine, orange et tournesol, que l'on a pu remarquer lors des premières collections de Demna Gvasalia pour Balenciaga. Les bottes seconde-peau en reprennent le motif. Total look. Finalement un peu d'allégresse dans ce monde de barbare. Le manteau ample, en fausse fourrure neige, véhicule une allure de dame fortunée. Les nantis peuvent aussi fuir la guerre quand ils se sentent persécutés. La danse Slave pour piano N°2 joué par Michel Beroff et Philippe Collard se troque d'une rave music entêtante joué par le groupe BFRND. Ca cogne. Quelques pièces pratiques défilent sur le podium et seront certainement des incontournables chez les jeunes milléniales comme le Hoodie rose layette, le Sweat ébène marqué d'une flèche et d'un 360°, le sweater à capuche poinçonné d'un XXXL ou le pull serviette de bain en cachemire. Le show s'achève dans une tempête chaotique avec deux looks rendant hommage au courage des ukrainiens. Un jogging à la configuration d'une tenue de surf de ski totalement canari. Puis, une robe bleue, identique au drapeau du pays, se couple d'une longiligne traine qui par un vent fonceur et frondeur vole telle une furie. Si le milieu de la mode apparait totalement déconnecté et souvent hors du contexte de la réalité, Demna Gvasalia, avec cette présentation, a axé son propos vers un réalisme véridique. On a le droit d'affirmer ses opinions et les scander et je l'en félicite. Mais, dans une société déjà anxiogène, violente, désobéissante, ne recherche t-on pas dans les présentations des Fashion Weeks à s'évader, recouvrer un peu d'espoir et de magie. A rêver tout simplement à un monde meilleur ?
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Balenciaga

Automne/Hiver

2022/2023

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Bottega Veneta Automne/Hiver 2022/2023 par Mathieu Blazy
Pour sa première collection pour la maison Bottega Veneta, Mathieu Blazy a exécuté, à mon humble avis, un carton plein. Tout le vestiaire demeure désirable à souhait et réfléchi intelligemment. Il mêle néoclassicisme, interpelant celui des années 80, avec une prise de position stylistique qui cadre exactement avec les envies à venir (Simplicité et technicité des matières). On ne perçoit aucun décalage superficiel ou de déphasage avec l'identité maison, toujours d'avant-garde. J'ai simplement tout adoré chez Bottega Veneta. Le lieu du show peut osciller entre une usine réhabilitée ou un parking réaménagé. Les néons alignés telle une escadrille diffusent une lumière froide qui se révèle en adéquation totale pour la mise en valeur de chaque pièce vestimentaire. Un podium central, à hauteur d'invités, s'achève par un second podium circulaire à 360 degrés. Une moquette, vert amande, douce au regard et aux pieds de ceux qui la fouleront. La musique : "This is your life" d'Ishi Yu, couplé à la Bande Originale du film d'anticipation Matrix, me projette vers un sentiment d'urgence. Il y a de l'engagement, du combat. Il ne faut rien lâcher. Le premier look semble d'une simplicité déconcertante : Marcel blanc (que l'on apercevra aussi en ouverture chez Prada, rehaussé du logo triangulaire iconique maison), jean classique ample, escarpin noir. Mais pas n'importe quel jean. Un cuir imprimé Denim. Un résultat ultra réaliste. A se méprendre. Un look mettant en valeur une certaine attitude pour épauler au mieux le nouveau sac maison. Une simple et longiligne lanière tressée soutenant le précieux sac que l'on pourra "trainer" comme un animal de compagnie. C'est l'attitude Bottega Veneta de la saison. Le second look, masculin, s'enorgueillit d'une simple chemise en popeline blanche. Même attitude pour le port du sac. Juste à l'arrière de l'épaule. Il en sera de même pour tous les mêmes sacs. Le trench, en cuir neigeux, reste totalement entrouvert par l'intermédiaire de pinces clipsées, insérées au niveau de la taille. Ingénieux. Idem pour le trench masculin en cuir Ébène. Une robe en cuir, sans manches, agrémentée de plumetis de cuir aux épaules, ouverte sur la poitrine et dézippée à l'entrejambe, permet d'auréoler des cuissardes tressées à se pâmer. La version combi sans manches, lie de vin, est à tomber. Les passages alternent looks féminins puis masculins. La mode masculine persiste dans une veine primaire mais indémodable. Mathieu Blazy propose de belles matières, toujours luxueuses, embellies de couleurs élémentaires permettant d'engendrer des pièces pour toujours : Complets larges (bleu marine, anthracite, gris ou citron, à configuration chevron) ; Tennis en cuir tressé ; Sacs "Pouf" ; Manteaux en laine (gris souris, beige) ; Cabans courts ou longs (bleu marine, laiteux ou noir) ; Boots tressées ; Pulls Patchwork (Tie&Dye blanc ou marron) ; Marcels ; Pantalons en cuir amples (chocolat, charbon, tabac, violet, vermillon ou châtaigne) ; Pulls en laine chinée (vermillon/turquoise, citron/anthracite) ; Surchemise en cuir châtaigne ; Tee-shirt en cuir opalescent ; Chemise à rayures tennis ; Trench en gros cuir (ébène) ; Bottes de pêcheurs en cuir natté ; L'importance est apportée aux deux sexes avec une égalité sans faille. Chez la femme, il y a une envie de véhiculer aisance, tout en optimisant cette touche d'extravagance et d'excentricité. Aussi bien à travers le design que le choix singulier des tissus. Certains looks, classiques, sont clairement réservés au domaine commercial. Smoking, manteau cintré, robe sans manches bleue marine, complet en cuir chocolat. Toutefois, si on fait fi d'un certain minimaliste assumé, on est ravi d'observer la courbure dorsale et convexe des cabans. Presque à la Cristobal Balenciaga. D'examiner avec curiosité des escarpins en fourrure flashy mandarine. D'étudier un caban en cuir rigide de couleur vermillon. De contempler les jupes évasées en cuir, embellies de jupons en fines lanières, ton sur ton (parme, citron, blanc cassé). De considérer trois robes dont les patchworks contemporains se composent d'une ingénieuse alliance entre lignes, pois, jets et projections peinturlurées. D'être abasourdi par des carrures imitant l'arceau d'un sac. D'être surpris par des jupes et mini jupes en cuir tressé. D'être ahuri par les robes/manteaux proéminentes en fourrure synthétique. Sans omettre ce manteau incroyable s'incrustant de clous dorés. Les robes du final, en sequins, sont redoutables. Celle de couleur vert fluo me fait plonger dans un cocktail de fruits sur vitaminés. Vittoria Ceretti demeure divine dans sa robe irisée ou quelques découpes laissent apparaitre des contours de fruits. Il me semble des citrons. Avec deux broches fleuries dorées s'agrippant sur les sequins nacrés. Quant Anok Yai l'escorte, c'est avec une robe similaire mais de couleur citron. Les fameux citrons. Apothéose. On fond sur les bottes en cuir totalement Gold. Une autre paire de cuissardes émeraude pouvant aussi faire l'affaire. Avanti Nagrath ferme la marche, comme elle l'a ouverte. Décidée à se battre jusqu'à la fin du podium. Avec sa nuisette en dentelle saumon, toujours brodée de sequins ton sur ton, elle investit toute son audace dans ce fugace bustier qui coïncide complètement à un haut de maillot de bain. Avec des cuissardes en satin poussin, elle ferme la marche, triomphante. En toute sincérité, les astres étaient alignés pour générer un des défilés les plus applaudis de cette saison Automne/Hiver 2022/2023. Un grand cru.
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Bottega Venetta

Automne/Hiver

2022/2023

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Chanel Automne/Hiver 2022/2023 par Virginie Viard
Une rivière de tweed recouvre entièrement le set-design de la présentation Chanel Automne/Hiver 2022/2023. Murs, poufs, podium, invitations, et même les immenses lettres Chanel accrochées sur le fronton du show, se parent d'un patchwork étincelant de ce célèbre tissu Ecossais. Une matière, à la base, rêche et austère qui se transforme, ici, en cocon de délicatesse pour l'ensemble des invités. Le tweed s'installe promptement et sera, par conséquent, le thème capital de la maison Chanel. Un indétrônable. Un code identitaire incontournable. Que serait la maison Chanel sans ce tissu fétiche. Gabrielle Chanel adorait le manier pour ses tailleurs légendaires. Karl Lagerfeld en faisait autant. Il le poussait dans ses retranchements et avait eu l'audace de le réinterpréter pour l'ensemble de la garde-robe Chanel : de la robe crinoline aux maillots de bain, du fichu sur la tête aux guêtres de certaines bottes, des sacs 2.55 aux casquettes. Tout en l'upgradant dans son rendu final : effiloché, abimé, troué, peinturluré, l'amalgamant à d'autres fibres naturelles ou précieuses. Un lainage multi-usage et définitivement indémodable. Virginie Viard va donc miser sur le tweed. Si elle l'alloue dans des tonalités de framboise, mure, cerise, châtaigne, marron ou charbon, elle souhaite le célébrer au travers de silhouettes traditionnelles. Pas de fioritures. Pas de fanfreluches. Pas de découpes tapageuses. Pas de formes chimériques. Virginie Viard encre sa mode dans une promesse de bienveillance afin de se sentir en totale adéquation avec le vêtement. L'idée étant qu'il soit commode, aisé à porter, tout en entretenant cet effet indémodable. Les coupes demeurent impeccables et tombent parfaitement. L'idée de réinterprétation des basiques est perceptible, tout en restant jumelés au gout du jour. Parfois, cela ne tient qu'à un fil. Les collants ou chaussettes élancées, en laine chinée, aux stries hachurées, apportent cette touche inattendue et décalée à chaque look. Un tantinet "pêche et tradition". C'est encore Vivienne Rohner qui apparait la première sur le podium. Son large manteau, au camaïeu de framboise et fraise, se pigmente de micros pois turquoise, vermillon, anthracite et lactescent. Des détails qui font toute la richesse de cette pièce. On lui ajoute des effets de matières pour le rendre ensorcelant. Quant à la veste étriquée rose bonbon, col Mao, elle se dépareille par une oblongue jupe, au-dessous des genoux, dont le design allie un tartan framboise et kaki. Cela matche. Mica Arganaraz se voit affubler d'une simple redingote au tartan turquoise et col Mao. Son look s'achève par de longues bottes de pêcheurs. Audacieux et intrépide. Une seconde veste, de configuration classique, se revêt de fourrure polaire caramel, tout en se galonnant de tweed Grenat. Impeccable sur Mona Tougaard. Sans omettre les bottes classiques de jardinage, en caoutchouc beige, siglées du double C. Un trench rectiligne, en cuir bistre, s'échoue juste à hauteur de bottes. La pièce classique par excellence. La chemise et pantalon cigarette, en cuir Tabac, sont à se pâmer. On les marie avec une veste pied-de-poule dont le sac bandoulière s'accordera ton sur ton. Very Scottish. Quant à Vittoria Ceretti, elle se la joue presque James Bond Girl avec une robe sans manches, en cuir souple seconde peau anthracite, agrémentée d'une double chaine dorée enserrant sa taille de gazelle. Les gilets ou chandails, cinq boutons, s'empourprent de tonalités joyeuses : moutarde, cuivre, fuchsia ; se brodent de sequins et de perles. D'autres, se parent de rayures bayadères ou d'arabesques fleuries. L'éventail est large. Le pull en cachemire de Giselle Norman s'agrafe de nombreuses broches camélias, aux accents de fruits rouges. Succulent. Le tweed s'accomplit à travers des configurations en forme de chevron, tartan ou carreaux. Parfois, les trois à la fois. Virginie Viard le décline surtout dans une palette de tonalité oscillant entre le Ying & Yang. Deux couleurs fondamentales. On s'amuse des effets de matières avec les irisés, les mats, les brillants. Des jeux d'optiques apparaissent avec les rayures, le sur-tissage ou les tricotages compliqués. Même si, parfois, visuellement certains looks paraissent un peu chargés, voire pesant. Cela vaut notamment pour deux looks surannés. Celui de Fran Summers avec sa robe bustier en tweed moucheté et celui d'Emily Miller avec son manteau un peu trop évasé. Toutefois, en dissociant certaines pièces, on peut commodément s'orienter vers des silhouettes allégées et plus fraiches. Les chaines dorées s'entassent autour du buste. Les fétiches de Mademoiselle s'intercalent régulièrement autour d'une hanche, au détour d'une épaule ou d'un cou : trèfles à quatre feuilles, cœur, aigle, cabochons. Les paillettes argentées s'invitent sur un fourreau à se damner dont Amanda Sanchez, mannequin cabine, le sublime à merveille. Une certaine sobriété demeura pour les robes du final qui se parent de tissus précieux comme la dentelle, le crêpe de soie, le tweed léger et le satin matelassé. Chanel poursuit son écriture stylistique vers une allure plutôt conventionnelle. Sans écarts. L'originalité ne sera pas le maitre mot. Toutefois, l'histoire se concrétise vers une affaire de style plutôt que de mode. Avec une manufacture qui excelle vers le haut de gamme.
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Chanel

Automne/Hiver

2022/2023

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Dior Automne/Hiver 2022/2023 par Maria Grazia Chiuri
Maria Grazia Chiuri a innové techniquement lors de l'ouverture du show Dior Automne/Hiver 2022/2023, en proposant une combinaison confectionnée à partir d'un réseau de leds. Dans l'obscurité complète, cet entrelacement lumineux mute en une illumination phosphorescente telle des lucioles à la tombée de la nuit. Maria Grazia Chiuri use rarement d'effets technologiques au sein de ses créations stylistiques. Elle demeure assez traditionaliste, cherchant plutôt à mettre en valeur des savoir-faire oubliés, voire égarés. C'est en cela que l'ouverture du show Dior reste surprenante. Notons aussi l'exceptionnel. Il est rare qu'un défilé débute dans l'obscurité complète et totale. C'est plutôt la situation inverse ou les lumières habillent les vêtements de mille feux. Alors, quand la silhouette de Sofia Steinberg, égérie maison, déambule comme un halo de lumière sur le podium, ce robot stylisé ébahi les premiers rangs. Une fois cet effet passé, la salle révèle une armada de portraits féminins des siècles passés, réinterprétés de manière contemporaine. C'est-à-dire peint à moitié et contenant des failles picturales. Notamment, avec ce double regard troublant conçu comme une erreur de reprographie. Sur un mur lie de vin, chaque portrait laisse apparaitre une bande incolore sur la partie basse du tableau. Comme si ces derniers n'avaient pu être achevés. Une réflexion sur l'art pictural, sa réalisation et sa reproduction. Mais, revenons à la collection. La veste iconique maison, la veste Bar, s'agrippe de protubérances ou de renforts sur le buste et poches. Gonflant la silhouette. Les gants longilignes prennent des inspirations motard avec leurs protections protéiformes au-dessus des mains et leurs attaches velcro aux coudes. Les couleurs demeurent flashy avec du vert pomme, canari ou vermillon. Les surprotections se callent au détour d'épaules, sur le pourtour de la taille ou l'arrière du dos. Rebrodé de la petite abeille Dior. Comme les systèmes traditionnels de protection usités lors de sports de contact tel que le hockey, le motocross ou le soccer américain. Un gilet, sans manches, gonflé à l'hélium, recouvre la forme d'un gilet de sauvetage marin. Le cuir de motard se confectionne de lès tricolores dont le jaune citron en jette plein la vue. Un tailleur pantalon, en laine chiné gris souris, recouvre une configuration d'une tenue de fitness. Notamment avec ses quelques stries arpentant l'ensemble du look. Un Marcel pétrole, pièce incontournable du vestiaire féminin cet hiver, et notamment vu chez Prada et Bottega Veneta, se calligraphie de la maxime "The Next Era". L'ère prochaine serait-elle en train de se dessiner sous nos yeux ? Certainement. Des looks plus sobres défilent avec un tailleur Bar et pantalon ébène. Parfois, la longue jupe plissée peut prendre un tournant asymétrique. La version mini jupe plissé fonctionne aussi. C'est dans le détail que nait la tendance. Le trench de Louise Robert, à la proportion de robe, s'incruste d'un corset à la taille, se fermant par un jeu de lacets croisés. Un autre manteau, en lainage anthracite, marque clairement la taille avec son ample ceinture corset, à l'allure grillagée. Totalement dans le Mood d'Azzedine Alaia. Les coiffures demeurent sages et s'édifient par une délicate natte se nouant sur le pourtour de la tête. Agrémentée de diadèmes en perle, de serre-tête en velours ou de colliers diamant. Des tartans bleu marine se marient avec une cotonnade beige via une veste, une canadienne ou une parka. Avec des bottes en cuir rustique. Le Vichy Yin&Yang s'intercale en diverses dimensions sur une jupe froncée asymétrique ou un simple veston. Le classique Tote Bag demeure toujours présent sur le podium. Un pull grège reprend l'aspect exact des poils de la race de chien Komondor. Dreadlocks en vois-tu, en voila. Des borderies florales, ton su ton, s'incrustent sur une veste zippé, un trench deux boutons ou une longue jupe en coton. Discrétion précieuse. Quelques looks en toile Denim pour la clientèle plus active. Enormément de couleurs sombres pour les robes de bals et de soirées. Elles s'embellissent d'exquises broderies perlées. Les dentelles et tulles transparents restent néanmoins agencés avec convenance et décence. On dévoile sans exhiber. Le chic parisien avant tout. Des broderies à la configuration d'arabesques, digne de la couture, ornent gilets, tops et même la totalité d'une robe mordorée, dont les volumes se font panier. Quelques imprimés à l'aspect de feuilles mornes seront totalement de saison. L'apothéose du show s'achève par d'interminables robes plissées et évasées, en mousseline aériennes, de couleurs moutarde, rubis, émeraude, charbon et neige. Un brin virginal pour les trois derniers passages. Maria Grazia Chiuri a axé son travail sur le prestance et la tenue du corps. Beaucoup de corsets, de ceintures corsetées, de baleines qui s'intègrent aux vestes Bar et robes en mousseline. La posture demeure le point primordial et essentiel de cette collection. La femme, cet Automne/Hiver 2022/2023 sera libre, droite mais maintenue.
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Dior

Automne/Hiver

2022/2023

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Gucci Automne/Hiver 2022/2023 par Alessandro Michèle
Alessandro Michèle a su toujours faire du melting-pot stylistique un de ses atouts majeurs. Une de ses forces. Une personne, un look. Pas besoin d'être tous similaires. On prône l'individualité. On la revendique. Gucci incarne cette diversité qui s'étend de la plus classique à la plus excentrique. Une fois de plus pour l'Automne/Hiver 2022/2023, Alessandro Michèle mélange les looks extrêmes avec une facilité déconcertante. Une dextérité sans faille. Un fil décousu entre chaque look mais qui fonctionne incontestablement. Alessandro Michèle adore titiller la notion des genres et cela depuis son premier défilé. Cette présentation ne dérogera pas à la règle. Le premier passage s'incarne par un costume cintré, deux pièces, ajusté à la perfection. En laine vierge, bleu marine, boutonnage doré, il incarne le style que l'on pourrait imaginer d'un milanais chic. Toutefois, le second look casse cette idée et demeure radical. Un lourd manteau, en fausse fourrure, dorée s'enfile sur un body lingerie, un tantinet coquin, cousu de lés en dentelles transparentes et divergentes, s'achevant par des bottes bleues céruléen, aux trois bandes latérales blanches. On valide immédiatement ce cobranding avec la maison Adidas. Le pantalon vert hooker, couleur iconique maison, allie discrètement, ton sur ton, les logos Gucci et Adidas. Des micros mors ambrés s'apposent juste au dessous des poches. Les trois bandes s'intégrant sur la longueur du pantalon. La veste anthracite se bâtit aux épaules par une proportion bouffante. Un smoking se pare d'un pourpre hypnotisant. Une cagoule, au design Waterpolo, se grime toujours des trois bandes blanches Adidas sur le crâne telle une crête. Avec le trèfle brodé sur chacune des deux oreilles (fameux logo créé en 1971). Une veste tartan, sans col, s'incruste de clou argenté, couplé d'un collier clouté. Les baskets bowling reprennent l'identité Adidas. Un perfecto lactescent se pique de nombreux clous, pouvant être inspiré d'une tenue de scène de Mickael Jackson. Le pantalon en cuir chocolat demeure d'une souplesse sans nom. L'envie de s'y glisser instantanément me submerge. Un complet en velours côtelé bleu outremer se rehausse sur la poitrine d'un trèfle surligné de Gucci. La même version en viscose de soie apporte une certaine légèreté, avec le sigle G, ton sur ton, reproduit à l'infini. Quant ce complet glisse jusqu'à la configuration d'un jogging stylé, il redonne des lettres de noblesse au streetwear. Cette fameuse démarche sportive, vecteur d'un certain bien être. Alessandro Michèle aime à user d'une palette de couleurs dignes d'un automne féerique : châtaigne, vert de gris, lichen, chocolat, mousse, neige. Un longiligne manteau en astrakan carbone réchauffe une silhouette stricte. Avec le détail mode : la paire de gants en cuir vert émeraude damasquiné toujours des trois bandes Adidas. Un cobranding qui, en terme commercial, dopera surement les ventes maison. Même si Gucci n'en a pas vraiment besoin. Elle demeure une maison iconique auprès de nombreuses générations et l'associer à un label sportif lui permet de concéder une image de "coolitude streetwear". Et, d'attirer l'œil d'une clientèle plus jeune. Le sac classique Bambou, en crocodile anthracite, s'appose sur des looks sportswear à la perfection. Alessandro Michèle perdure dans une présentation désordonnée : une combinaison aviateur en cuir bleu ciel côtoie un jogging en laine tricoté ; un smoking en velours anthracite brodé de bouquets floraux en fil d'or jouxte une robe tee-shirt longiligne, col en V, de couleur carmin, agrémentée de mitaines de boxe poussin. Un trench argenté, aux manches courtes, s'évase jusqu'aux genoux telle une protection contre les éruptions volcaniques. Un manteau, classique, s'imprime de motifs de têtes chevalines. Une vibration à la Hermès. On demeure surpris à chaque passage. Des imprimés s'inspirent totalement de tissus africains, les fameux imprimés Wax. Le trèfle Adidas s'agrandit à la puissance dix et se couple au logo GG. Il peut prendre des tonalités sixties allant de la moutarde au bleu roi. Des accessoires, tamponnés Adidas, feront la joie des générations Z et Milléniales : le béret outremer, le top de fitness asymétrique, la casquette recouverte de la toile Gucci, les mitaines en cuir, le cabas oversize, les solaires aux verres pamplemousse ou le bustier/corset forme en V. Une collection qui se veut joyeuse par ses couleurs éclatantes et chamarrées, par un melting-pot d'imprimés ethniques originaux (comme les tissus tartans, wax ou vichy) et quelques patronages stylistiques aux proportions complètement excentriques. La collaboration avec la maison Adidas est une réussite. Tout simplement parce que les pièces se couplent absolument avec le vestiaire Gucci. Il n'y a aucune distorsion stylistique entre les deux maisons mais une osmose absolue.
 

Gucci

Automne/Hiver

2022/2023

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Louis Vuitton Automne/Hiver 2022/2023 par Nicolas Ghesquière
Nicolas Ghesquière a délaissé son lieu de prédilection, le musée du Louvre, pour dévoiler sa nouvelle collection prêt-à-porter Louis Vuitton Automne/Hiver 2022/2023. Sacrilège. Que nenni. Parfois, il apparait préférable de zapper un lieu pour éviter l'installation de toute routine. Même s'il parait prétentieux d'annoter que l'on pourrait se passer d'un lieu unique tel que le Louvre. Mais, le milieu de la mode aime être surpris. Il faut lui titiller les axones. Lui bringuebaler l'esprit. Le faire voyager vers d'autres contrées négligées de notre chère capitale. Alors quel autre lieu pourrait mériter tout cette agglomération de modeux ? Un autre musée parisien assurément. Un peu moins notoire, moins prestigieux que le Louvre et son histoire, mais au demeurant tout aussi féerique : le musée d'Orsay. Cette ancienne gare, à la halle majestueuse, resplendit de lumière de par son impressionnante verrière. Ce puit étincelant tamise l'éclairage avec bienveillance afin de magnifier chaque œuvre exposée. Avec son dédale de salles ouvertes, de couloirs, de paliers, d'escaliers, le parcours des mannequins en sera plus hardi, déterminé, libre et ouvert. Un cheminement à travers des siècles de peintures et sculptures. C'est un lieu commun mais Nicolas Ghesquière affectionne les Arts plastiques. Inlassablement, à travers ses collections, il aime mêler et confronter ses créations vestimentaires aux œuvres des plus grands, parfois, datant de plusieurs millénaires. Une collision artistique. Un anachronisme garanti. Alors, quand le départ est lancé, ça clash de suite. L'actrice et mannequin Hoyeon Jung, star de la série coréenne "Squid Game", foule la première le marbre blanc du musée d'Orsay. Blouson en cuir chocolat, chemise en soie écru, cravate florale jaune, pantalon de marin gris souris, hachuré de segments ébène. Décontracté. Un soupçon Boyish Preppy comme aime à définir les rédactrices de mode. Le pantalon évasé fait son come-back dans des tonalités naturelles : en laine beige, en velours côtelé Camel, en jacquard doré. D'autres se parent d'arabesques digne des plus beaux papiers peints psychédéliques. On peut noter le retour fracassant de la cravate en soie à papa dont les motifs se font floraux. Un accessoire tombé en désuétude mais encore porté par les salariés du secteur tertiaire. Il s'allie avec un foulard noué. C'est en cela qu'est la grande nouveauté. Nicolas Ghesquière perpétue cette recherche de nouvelles formes corporelles. Même si celles-ci ne se prêtent guère au quotidien. Rebrodée de fils d'or, une robe se déploie en forme de corolle pour laisser tomber deux traines transversales. Telles des écharpes. Une néo robe à paniers. Comme au XVIIIème siècle. Une pièce inventive parfaite pour faire la Une des magazines. Mais, les tops se couronnant par de longues écharpes seront rares, me semble-t-il, à apercevoir dans les venelles de notre capitale. Elles ne sont pas dénuées de sens mais ardues à enfiler au quotidien. Réservées pour l'exceptionnel. Quelques K-Ways saumonés ou lactescents soupoudrent cette présentation. Les baskets, style "All Stars", perpétuent cette vibration de "coolitude". Elles se parent de motifs Ikat, de toile cirée LV classique. L'embout des mocassins sont guillotinés. Les bracelets multicolores sont réalisés à partir de mousquetons d'escalade. Idem pour les colliers. Les matières textiles utilisées demeurent précieuses comme les lainages rebrodés de perles en verre. Ou bien des lignes en sequins multicolores recouvrant l'apparence d'une finition Tweed. Les poches des robes s'accrochent latéralement à la configuration de besaces d'alpinisme. Le sac à main se fait banane. Un dernier sac approche l'aspect du fameux Kelly d'Hermès. Le chic investit le sac malle en croco Camel dont l'ouverture se fait soufflet d'accordéon. Nicolas Ghesquière a œuvré, lui aussi, cette saison sur la notion du classique revisité. Les intemporels d'une garde-robe. On perçoit ce désir de retourner vers les fondamentaux. La veste, quatre boutons, en tweed rouge, gansé d'un lé anthracite, incarne cette allure de Mademoiselle. Cependant on l'enfile avec un pantalon zébré et gaufré. L'effet zébré se calcule sur un jogging chic. Wellness. Le vocable Louis Vuitton s'appose un peu partout : sur une étiquette en bas d'une écharpe, en toute discrétion sur le sommet d'un mocassin, tamponné sur le cuir d'un cadenas, en contrebas d'un long tee-shirt. Un manteau s'emberlificote de fausse fourrure singe, mettant en valeur le tissu jacquard fleuris, digne des plus beaux tissus de la cour du Roi Louis XIV. Sur Seng Khan. Les blazers, bouton solo, bleu Klein ou écru demeurent dans une veine Over Size et stoppent aux genoux. Ils se font presque pardessus. J'ai vraiment été attiré par le travail incroyable des imprimés effets d'optique. Les fines lignes géométriques, aux tie&dye qui se dégradent du tournesol au chocolat, du bleu ciel au bleu nuit. Ce fameux effet Vasarely. Accouplées à un jeu savant de surpiqures et de minuscules fils en liberté, ces pièces demeurent totalement démentes. Des faciès, en noir & blanc, s'estampillent sur les robes du final. Des robes mixant tonalité flashy, imprimé végétal, effet de matières (froissé, gaufré, brillance, tricotage), ce qui les rend uniques et artistiques. Difficilement reproductibles. Le domaine de la photographique prend toute sa splendeur avec ces insertions de portraits sur les ultimes silhouettes. Un véritable travail technique de reproduction textile. Pas aisé à mettre en place. De longilignes tee-shirts soufflent cet esprit sportif sur la fin de présentation. Ils sont agrémentés de pantalons en jacquard fleuri ou de robes en mousseline aérienne. Des tee-shirts toujours over size. Version Arty avec les incrustations silhouettes surmontées d'un démesuré sigle V bicolore sur Sora Choi. Carrément British avec les sobres rayures sur Sofia Steinberg. Ou totalement athlétique, tel un maillot de rugbyman, dont les rayures horizontales jaune fluo et bleu roi diffusent une allure étincelante à la chanteuse et muse maison, Lou and the Yakuza. Elle clôture le défilé à vive allure, insufflant cette énergie solaire, propre à la maison Louis Vuitton.
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Louis Vuitton

Automne/Hiver

2022/2023

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Loewe Automne/Hiver 2022/2023 par Jonathan Anderson
L'art contemporain demeure un domaine ou la fantaisie, l'imaginaire, le fantasme peuvent imposer des concepts, des lois abstraites, des attitudes sages ou simplement des folies pures à travers des œuvres incarnées évoquant un réel sublimé ou chimérique. Quand l'esprit bouillonnant de Jonathan Anderson s'attaque, une fois de plus, à l'univers artistique contemporain, on prédit que l'originale fantaisie sera présente. Tout en générant du sens. Car Jonathan Anderson cogite énormément pour exécuter ses concepts stylistiques. Il faut que sa présentation raconte quelque chose d'audible pour ses invités. L'un des seuls designers à confronter et télescoper sculpture, peinture, techniques textiles et stylisme. Le tout pour engendrer un style vestimentaire unique, souvent "jamais-vu". Quelle plus belle glorification que de définir ses créations de "jamais-vu". Des citrouilles surdimensionnées se dressent sur un sol terreux. Aride. Inanimé. Une allégorie de la terre brulée et l'appauvrissement des terres. Seuls quelques géantes légumineuses subsistent, éparpillées sur ce tapis presque infertile. Le top Kai Newman, telle une guerrière échappée du film "Mad Max", foule ce vaste espace avec une robe cuirasse. Une armure en cuir épousant ses formes tel un justaucorps. Thierry Mugler l'avait notamment exécuté en version plastique. Monsieur Saint-Laurent en version métal doré. Les plissés vaguelettes sont inertes. Totalement rigides. Les robes suivantes demeurent identiques mais dans des tonalités plus claires comme le rose pastel ou le neige. Les bottes de chantier prennent la configuration de sacs plastique. Etrange et dérangeant. D'autres bottines ont la conformation de quadrilatères. Probablement un bon moyen pour faire face aux déferlements des éléments climatiques. Puis, survient "La Robe". Celle qu'on ne peut zapper. La robe automobile, en tissu élasthanne, dont le profil dessine le carénage d'une simple voiture. Comme si une envie folle d'enjamber une voiture à pédale de notre enfance survenait. Dommage que Jonathan Anderson n'ai pas poussé son concept, en immatriculant sa robe par une jolie plaque LOEWE. Le tulle irisé, ébène ou lait, se chiffonne sur des tee-shirts cristallins. Une autre robe en cuir, sans manches, aux découpes aléatoires, prodigue un sentiment de nébulosité. Voire de chagrin. Comme si la fille avait été roulée dans une cuve à pétrole. Une doudoune sur gonflée, comme une chambre à air, attire l'œil, en sur dimensionnant sa musculature. Le haut ultra rigide, telle une coque, maintient la silhouette d'América Gonzalez, corsetée comme une pique. Chic et élégant. Les robes "Bouches" sont renversantes. Jonathan Anderson est vraiment au top de son art. La bouche, glosée vermillon, s'incruste tel un bustier, laissant s'évanouir au sol sa délicatesse mousseline corail. Existe en version gris béton ou fuchsia pour Loli Bahia. Des ballons, semi-gonflés, en plastique, s'incrustent discrètement sur des poitrines telles des soutiens-gorge. Les pantalons peuvent surprendre aussi par leurs constructions étonnantes. L'un s'élargit de cercles aux genoux comme certains designs du metteur en scène Philippe Découflé. D'autres, au niveau de la taille, se décomposent par une forme protubérante en fausse fourrure. Presque comme l'ouverture d'un vagin. Oups. On ressent fortement l'ode à la femme. Jonathan Anderson les aime par-dessous tout. Il les protège et les célèbre. Une longiligne robe fluide s'estampe d'un trompe l'œil au corps de Pin-up nue, chaussée d'escarpins talons aiguille, verni rouge. D'ailleurs, on récupérera ces dernières, enchâssées et emboitées dans le méandre de tulle d'une autre robe seconde peau. Une néo "Skin Dress" de Karl Lagerfeld, vu sur son podium au début des années 90. Les trompes l'œil peuvent dessiner une veste naïve ou des mains gantées de velours, ennoblies par de faux ongles rouges comme sur la robe de Julia Nobis. Des ballons, toujours à moitié dégonflés, se glissent sous une épaule, un sein ou bien au détour d'une taille. Semi-gonflés, ils viennent s'intercaler entre les délicates brides des escarpins ou sur des talons. Quelle idée cocasse. Tellement divergent. Quelques rubans argentés s'enroulent aux chevilles avec allégresse. L'art de l'agencement. Quelques manteaux en laine bouillie se composent de nervures textiles aléatoires. D'autres, bicolores, ont des allures de kimonos déstructurés. Des robes aériennes bougent comme des méduses dansant au des courants de l'océan. Les tonalités restent toujours sobres et subtiles : marron, beige, anthracite, gris, blanc. Jonathan Anderson innove continuellement dans sa discipline. On peut aimer ou détester. Mais, on ne peut lui ôter cette irrémédiable envie de recherche perpétuelle, d'exploration et de création pour enfanter de pièces consubstantielles et uniques. Il est rarement aisé de faire cohabiter prêt-à-porter et création artistiques pures. Mais, Jonathan Anderson y arrive à chaque fois et reste le Maestro en ce domaine.
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Loewe

Automne/Hiver

2022/2023

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Miu Miu Automne/Hiver 2022/2023 par Miuccia Prada
On connait l'affection de Miuccia Prada pour les Arts en général. Cette passion intense l'invite à mettre en valeur, notamment au travers de ses défilés, le travail d'artistes d'avant-garde ou méconnus du grand public. Nathalie Djurberg et Hans Berg ont collaboré cette saison avec Miuccia Prada. Ils ont réalisé un film d'animation, en pates à modeler, venant titiller la curiosité des invités. Une main squelettique, à la proportion difforme, s'ouvre lentement, laissant apparaitre une fleur radieuse. Cette main la touche, la malaxe, l'écrase, la caresse. Une seconde, peut-être de lotus, s'ouvre et se ferme à l'infini. Une allégorie de la vie ; de la naissance à la mort. Il y a un début et une fin. Comme la préparation d'un défilé. Pour cette saison Automne/Hiver 2022/2023, l'équipe Miu Miu poursuit son discours sur la jupe mini-mini dont le sujet avait été abordée lors de la précédente collection (Voir article Miu Miu Eté 2022). Cette micro-jupe en cotonnade beige avait cartonné ce Printemps/Eté 2022, aussi bien dans la presse féminine en Vogue que sur les réseaux sociaux. Pour cette saison hivernale, elle demeure, à nouveau, la pièce maitresse de cette présentation. Miu Miu n'a pas tergiversé pour réitérer ce hit vestimentaire de la saison passée. Mais, cette fois, en version mini-jupe plissée alcalescente à la configuration de jupe de tennis. Apposée toujours de l'inscription Miu Miu juste en-dessous du nombril. Une version évasée, allongée aux genoux, demeure proposée à celles qui souhaiteront une silhouette moins découverte. Toujours maintenue par une jolie ceinture en cuir. Ou un duo de ceintures. Les ballerines de danseuses, en satin immaculé, se rehaussent d'oblongues chaussettes blanches. Avec griffonné sur la bride un Miu Miu graphique. Un look sportswear, un tantinet désuet. Pourquoi pas ? Après tout la mode du vintage et de la seconde main incarnent l'air du temps. Le cou s'habille d'une filiforme et longiligne écharpe en soie unicolore. Elle se noue simplement et prend l'apparence parfois d'une Lavallière. Les polos tennis unicolores se galbent aux emmanchures et cols de rayures tricolores. Aux couleurs du drapeau français. Un flashback sur les marques sportives des Seventies tel que Le coq sportif. Un autre polo peut se morceler de lès de délicates dentelles afin de concéder une touche plus sensuelle à la silhouette. Moins athlétique. Miu Miu déstructure un même look : l'interminable jupe plissée se couple d'un polo ample mais rikiki, stoppant à la lisière du nombril. Cette zone focalise toute l'attention de cette présentation. Il est visible tout le temps. Toutefois la grande nouveauté et, je pourrais dire Scoop, s'inscrit dans le retour de la marque Miu Miu Homme. Une immense joie m'envahit car cette ligne menswear était ma marque de prédilection jusqu'à son arrêt définitif. Pour son retour sur le podium, on aperçoit un micro short de tennis bleu marine, complété de son polo, ton sur ton, rehaussée du logo Miu Miu sur le cœur. Avec un manteau en peau de mouton retournée chocolat. Les derbys anthracite, épinglés d'une plaque dorée, restent dans une veine traditionnelle. Le même look, en variante neige éternelle, est à croquer. Un pull en cachemire, col en V, réinterprète différemment le design des losanges "Burlington". Que l'on percevra sur plusieurs pièces du vestiaire féminin. En gris souris ou Camel. Le blouson en cuir chocolat s'agrémente d'un short laissant entrapercevoir un caleçon en satin noir. Avec toujours ce fameux duo de ceintures. Un pantalon, au tressage latéral, au point de croix, se colorie d'un adorable lie-de-vin. Peu de looks mais totalement irrésistibles. Chez la femme, les manteaux en laine, deux boutons, s'inscrivent dans une veine classique. En gris ou bleu marine. Le blouson en peau de mouton retournée tabac sera parfait lors des retours des températures fraiches. La version Boléro parait aussi attrayante. Une parka en cuir vieillit s'ennoblit d'un col en fourrure singe immaculé. Une autre se gargarise de strass diamant et de puzzle de python dragée sur les pourtours des épaules. Le tartan et pied de poule, grandes tendances de l'hiver prochain, réintègrent le vestiaire féminin en couvrant minishorts, boléros croisés, vestes over size dans des coloris récursifs allant du marine au grège, du châtaigne au chamois. Un tailleur, à la veste zippé, se couvre entièrement de python. Quelques looks en cuir peuvent s'apparenter à ceux d'aviateurs des années 30. Les micro-shorts se font culottes comme sur Rianne Van Rompaey. Une robe, sans manches, à la configuration de filet de pêche, s'enorgueillit de broderies en strass diamant. Ca brille. Elle s'enfile par dessus un micro top en mousseline bleu nuit et d'une culotte cuivrée. Une autre version investit un caraco et jupe mi-longue. Les strass seront assidus sur les looks de soirée. Une mousseline paille se brode de diamant et broderies florales irisées. La version chamallow de Pasha Arulia reflète presque, à quelques tonalités près, la couleur de ses cheveux. La version sur Selena Forrest demeure beaucoup plus ténébreuse et sombre. Mais, non moins aguichante. Toutefois, quand les robes, toutes en transparence se mélangent de strass diamant, de mousseline rose ou bleu pastel et de dentelle dorée, ce patchwork incongru explose à la vue de tous comme une pyrotechnie textile des plus inouïes. Comme sur le top mexicain Issa Lish. Un vestiaire juvénile, athlétique et extravagant qui pourra, au delà d'une simple saison, adopter aisément d'autres pièces passées et futures de la maison Miu Miu. De véritables intemporels.
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Miu Miu

Automne/Hiver

2022/2023

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Paco Rabanne Automne/Hiver 2022/2023 par Julien Dossena
Cette saison, la maison Paco Rabanne a osé suggérer une présentation sous l'égide d'une pause méditative prolongée. Quelle idée formidable, rarement tentée. Avec une musique apaisante, adoucissante, ponctuée de longues respirations sonores, ces dernières se diffusent tel un lent narcotique tout le long de la présentation. On plane. On divague. On se laisse transporter vers un ailleurs. Il y a presque un début de transe. Redondante, la mélodie favorise un sentiment presque de paix et de recueillement intérieur. Un bien-être sincère lorsqu'elle demeure couplée aux jeux de lumières incessants, oscillant entre le parme et le mandarine, le jaune solaire et le pamplemousse. Des Tie & Dye harmonieux. Un véritable voyage intérieur pour ceux qui désireront ouvrir leurs chakras. Les chakras de la mode, bien évidemment. On demeure plongé, pendant dix minutes, dans une perception alternative de levés et couchés de soleil. Des faisceaux lumineux bienfaisants. Une voix monocorde répète à l'infini "Right Now, right now, right now". C'est maintenant qu'il faut prendre soin de soi, profiter de la vie, éveiller son être intérieur, tout en maintenant une attention assidue aux proches qui nous entoure. Le designer Julien Dossena a finement joué cette carte du positivisme en propulsant la collection Automne/Hiver 2022/2023 vers des dimensions supérieures. Akon Changkou ouvre avec clémence ce show attendu. Son look combine l'idée d'une robe chemise, anthracite, agrémentée d'une sur-jupe, taille haute, peut-être réalisée en tweed moucheté gris souris. Avec ses babies argentés, effilées, Akon possède tous les codes vestimentaires d'une adolescente bien comme il faut. Sofia Steinberg la suit avec son allure rentre dedans. Fonceuse, elle porte une robe en mousseline, imprimé bouquets, dont les manches fleurent presque les limites des mains. Son col immaculé, en épaisse dentelle, prend la configuration de "pelles à tarte". Un corset, losange bleu ciel, enserre sa taille. On ne discerne pas si celui-ci demeure intégré au look ou est superposé. Effet d'optique. Il y a presque une alliance appropriée entre rigueur et délicatesse assumée. Le top América Gonzalez se voit affublé d'une combinaison pantalon ébène dont le corset Ciel prend le pourtour d'un "Panty". Julia Nobis dévoile une robe rose bonbon dont la partie supérieure s'inspire d'uniforme de gymnaste, véritablement seconde peau. En élasthanne probablement. Puis, la partie inférieure se modifie vers une configuration "corolle". Les manches ultra-longues ne laissent plus apparaitre le bout des doigts lorsque Mao Xiaoxing enfile son top seconde peau argentin, rebrodé de laconiques pois miroir. Beaucoup de jupes courtes pour cet hiver. Des volants aussi qui se chevauchent, se superposent. Il y a du volume. On s'en amuse. Peut-être un moyen inconscient de garder encore un peu ses distances. Les épaules sont resserrées et étranglées. Quelques ensembles se construisent d'une seule et même pièce, même si elles laissent transparaitre le contraire. Les jupes se fendent sur la cuisse. J'adore la robe bustier d'Ashley Radjarame qui laisse apparaitre discrètement, sur le pourtour de la poitrine, un lé en fer argenté. Comme un lien discret entre passé et présent de la maison. Un point essentiel de l'écriture stylistique de Monsieur Paco Rabanne. Le gilet en mohair Beige, tout doux, à la dizaine de petits boutons dorés, recouvre des couleurs Tie & Dye sur ses périphéries. Des sequins anthracite investissent le look de Giselle Norman. Sa jupe se gonfle, enfle. Dans le dos, un nœud démesuré, toujours en sequins, chute avec grâce sur son séant. La taille demeure souvent marquée. Les boucles d'oreilles d'Oudey Egone évoquent presque la forme de gramophones. Métal. Finalement, Julien Dossena intègre, lors de cette présentation, des détails stylistiques redondants avec notamment les manches bouffantes, traines, volants qui s'amoncellent, froufrous, cotonnades en dentelle, mohair, jupes fendues et jeux de plissés. Sans omettre l'identité primordiale de la marque : le fameux métal argenté qui prend, ici, une fluidité déconcertante. Que l'on découvre notamment sur les dernières robes de déesses grecques en couleur argenté, rosé et doré. Un vestiaire féminin dont le bien-être corporel demeure le maitre mot.
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Paco Rabanne

Automne/Hiver

2022/2023

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Prada Automne/Hiver 2022/2023 par Miuccia Prada et Raf Simons
Un casting du feu de dieu fusionnant d'anciennes muses maison avec la génération des milléniales, mais quelle pourrait-être la maison italienne ultra pointue pouvant relever ce défi ardu ? Un seul et unique nom me traverse l'esprit : Prada. Quel réel plaisir de scruter à nouveau toutes ces magnifiques silhouettes, à l'élégance captivante, sur ce podium de l'Automne/Hiver 2022/2023. Pour nommer les essentielles, on peut épeler les délicieux noms d'Amanda Murphy, Arizona Muse, Elise Crombez, Emily Sandberg, Erin O'Connor, Hannelore Knuts, Irina Kravchenko, Kinga Rajzak, Marina Perez, Liya Kebede, Querelle Janssen ou Suvi Koponen. Toute une myriade de filles qui ont fait leur classe chez Prada, de la fin des années 90 jusqu'aux années 2010. Sans omettre de prononcer les noms des stars actuelles des podiums : Kaia Gerber, Kendall Jenner, Mica Arganaraz, Rianne Van Rompaey, Lina Zang, Julia Nobis, Anok Yai ou He Cong. Un choc des générations. Prada veut absolument transmettre le message que sa mode demeure avant tout un style "transgénérationnel". Pour finaliser ce casting dément, la comédienne de la série Euphoria, Hunter Schaffer, muse actuelle de la maison, clôt le défilé. Au delà de ce casting rêvé, la maison Prada a souhaité emmener ses invités dans univers onirique, chimérique. Avec un décor pouvant résulter d'un film d'anticipation, caractérisé notamment part ce longiligne tunnel agrémenté de néons parmes et de grilles en métal argenté, le tout rehaussé par une moquette feutré, de couleur moutarde, l'agencement des focales lumineuses dessinent cet interminable Z sur l'ensemble du podium. Un Z comme Zénith. Car Prada est au Zénith. C'est Kaia Gerber qui ouvre le show, avec cette allure un peu mutique. La simplicité de ce premier look touche. Marcel lactescent, pimenté par un simple logo métallique Prada s'accolant entre la poitrine. La jupe s'édifie autour de trois bandes latérales de tissus disparates: lainage gris souris, satin noir, gaze transparente brodée de perles jaune canari s'agitant et vacillant en tous sens. Les looks suivants insistent sur un tailoring maitrisé. Les manches demeurent longues. Les épaules sont parfaitement ajustées. Les jupes, au dessous des genoux, demeurent toutes transparentes. Les sous-pulls, col cheminé, seront le hit de la saison. Surtout avec l'inscription, en fines lettres, de la marque. Comme un mini tatouage. Les escarpins continuent, comme la saison précédente, à fendre l'air tellement ils demeurent effilées. Amanda Murphy porte un Marcel blanc et une simple culotte. Mais, la touche stylée s'inscrit dans la superposition de ces deux pièces avec une robe en gaze transparente, sans manches. Cela crée un effet de matière innovant et peu vu. Les broderies "Flashy", dans des tonalités Mandarine ou Canari, permettent de les dissocier plus clairement grâce à cette gaze chiffonnée. Les robes/manteaux, d'envergure classique, incorporent un jeu de perles argentés s'enroulant autour du cou. Celles-ci se fixent par une broche triangulaire au logo Prada. Le gris s'appose discrètement sur l'ensemble du vestiaire. Un gris usité par le secteur tertiaire. Un gris de travail. Le pull, col en V, efface les épaules par sa carrure bien trop ample. Une jupe plissée s'évase telle celle que Christian Dior avait dessinée après la seconde guerre mondiale. Le bombers Oversize de Sherry Shi se brode de nombreuses fleurs en rhodoïds, ton sur ton. J'exalte. En vert Kaki sur Julia Nobis. En bleu nuit sur Kendall Jenner mais cette fois avec des plumes. Le tout porté toujours avec ces fameuses jupes en gaze limpide. Kinga Rajzak enfile un lourd manteau en cuir kaki à se damner. Il a presque la configuration des trenchs militaires de la guerre 39-45. En chocolat pour Hannelore Knuts. En ébène, pour Arizona Muse et Querelle Janssen. Mais, le même manteau, version rose Barbie d'Emily Sandberg sera, certainement, pris d'assaut par toutes les fashionistas et influenceuses Mode. L'impact visuel reste dément. Trois pulls en cachemire se dénotent par leurs imprimés ancestraux et reconnus: le fer à cheval ou U, les mosaïques olivâtres et châtaigne et les polyèdres de plusieurs couleurs. Quelques manteaux et vestes se recouvrent sur les emmanchures de fourrures synthétiques dans des tonalités vert pomme, rose tendre ou bleu layette. Avec des plumes, sur les vestes d'América Gonzalez et Mica Arganaraz. Quelques blousons aviateurs finissent d'achever ce vestiaire idéal. Les sacs triangulaires s'accrochent en duo. Une présentation rondement menée par Miuccia Prada et Raf Simons. Une garde-robe qui invite à se projeter totalement dans l'ensemble de tous ces looks hivernaux qui persistent à être originaux et novateurs. Avec toujours une touche décalée et de folie maitrisée. Prada m'émerveillera toujours.
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Prada

Automne/Hiver

2022/2023

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Saint-Laurent Automne/Hiver 2022/2023 par Anthony Vacarello
"Sans élégance de cœur, il n'y a pas d'élégance" aimait à répéter Monsieur Yves Saint-Laurent. C'est terriblement vrai. Monsieur Saint-Laurent était dans la prospection de cette quête perpétuelle pour essayer d'atteindre cette grâce ultime. Une élégance qu'il réinterprétait chaque saison à la guise de son inspiration du moment. Toujours chic. Jamais vulgaire. Que la femme, dont il rêvait et revêtait, puisse s'incarner aisément dans des créations toujours audacieuses, respectueuses de son anatomie et sa personnalité, mais dans l'air du temps. Cette saison, Anthony Vacarello s'est attaqué à l'allure identitaire d'Yves Saint-Laurent. Pas de Saint-Laurent. D'Yves. Un travail ardu à réaliser car il ne faut pas tomber dans la réplique. Toutefois, le designer s'est transcendé en ouvrant son cœur comme jamais afin de rendre hommage à l'écriture stylistique d'Yves Saint-Laurent. Tout en insufflant sa personnalité. Le cadre magnifique, tour Eiffel en toile de fond, permet cette touche de magie. Dans un immense caisson, entouré de baies vitrées à 360 degrés, se déploie un salon rectangulaire agrémenté d'une moquette beige poudré. Peut-être " Nude ". Une estrade alcalescente accueille les invités. Placés à divers paliers, ceux-ci peuvent observer la vie nocturne sur les jardins du Trocadéro ou sur la tour Eiffel scintillante. La vue sur le monument iconique étant réservés à quelques VIPs dont l'icône Catherine Deneuve, la muse de Saint-Laurent Betty Catroux ou l'actrice Salma Hayek et son mari, PDG du groupe Kering, Francois Pinault. La bande son diffuse des airs d'opéra classiques remastérisés. La première silhouette, caban en cachemire ébène et longiligne robe en satin blanc, résume déjà l'esprit de la collection : noir et blanc seront les couleurs prédominantes. Un vestiaire minimalisme qui allie fluidité et simplicité. Un vestiaire qui permet de focaliser sur les accessoires maisons : lunettes de soleil ; bracelets en argent, en bois foncé, en simili ivoire ; boucles d'oreilles géométriques, en argent ou Or. Mais, aussi, sur les escarpins, talons aiguilles, aux fines brides diamantées. Strassées. Le trench en cuir sombre descend aux genoux. Une robe col cheminé recouvre l'ensemble de la silhouette. La multiplicité des bracelets en argent, couplé à d'autres plus sombres, en fait l'attrait. Rigueur. Sobriété. On recouvrera ce même look, en fin de présentation, en version incolore. Il y a une frugalité dans le style qui permet de focusser à l'essentiel. C'est à dire les lignes, les formes. Une robe élancée, chocolat, seconde peau, s'enorgueillit de légers plissés sur le corsage créant un effet double losanges sur le buste. De la fausse fourrure habillent quelques manteaux, gabardines. Très similaire aux looks de Catherine Deneuve dans le film "Les prédateurs" de Tony Scott. Celle-ci peut galonner certaines pièces. Les cols peuvent être surdimensionnés, véhiculant cet effet de Power Girl. Comme sur le top australien Adut Akech. Anthony Vacarello exécute une silhouette qui s'achève, souvent, par une robe ou une jupe en transparence, notamment lorsque le mannequin saisit un manteau, veste ou caban. Il y a presque une idée canaille. Si on se démet du haut, probablement, le reste laissera apparaitre des dessous plus affriolants. Un perfecto se pare de peaux d'alligators laquées. Ce dernier peut se compléter par une longue robe en mousseline volantée ou de satin noir. On pourra, aussi, opter pour un legging ténébreux en satin. Certaines épaules peuvent être marquées par un jeu d'épaulettes. Mais à bonne escient. Le trench de Mona Tougaard peut se faire robe lorsqu'il est ceinturé au niveau de la taille. Une rose noire accrochée sur le cœur. Toujours avec une jupe en transparence jusqu'aux chevilles. Laissant dévoiler les sublimes escarpins à la bride strassée. Loli Bahia, toujours à l'allure hiératique, porte un perfecto en cuir prolongé jusqu'aux genoux. Miriam Sanchez se pare à merveille de cette oblongue robe plissée, seconde peau, scalpé par deux triangles au niveau de la taille, maintenue par une rose immense au nombril. La version émeraude se fait fourreau. La version anthracite offre un décolleté qui n'aurait pas déplu à Mr Saint-Laurent. Avec une immense rose parme à la croisée du vertigineux dénudé. Un manteau en mouton retourné, aux larges emmanchures, donne toute sa prestance à une femme sexagénaire. Saint-Laurent pour toutes les femmes. On récupère aussi les fameux leggings et léotards qu'Anthony Vacarello avait promulgué lors de sa collection Latex. Ici, en version anthracite et élasthanne, ils paraissent plus aisés à enfiler. La panne de velours, tissu sophistiqué, est utilisée pour un ensemble pantalon soyeux porté par Seng Khan. La jeune Marie Kippe, cheveux roux tout courts, dénote avec son ensemble en dentelle fleurie ébène. Top au col cheminé, sans manches, et simple pantalon laissant apparaitre toute sa frêle silhouette. Avec une culotte noire basique. Ouf, on est sauvé. Quelques transparences maitrisées sur la robe de Rianne Van Rompaey ou Esin Bicak, image Maison pour le Printemps/Eté 2022. En tout bien tout honneur. Le smoking s'offre deux versions : robe manteau ou classique. Avec un coup de cœur pour la démarche d'Omahyra Mota qui joue la garçonne comme personne. Enfin, elle ne le joue pas, elle l'incarne. Les filles Saint-Laurent de cet hiver auront toutes une classe folle. On se délecte distinctement de ce fameux chic parisien. Anthony Vacarello a réussi à créer, avec brio, une collection Automne/Hiver 2022/2023 qui aurait pu jaillir de l'imagination folle de Monsieur. Ce dernier l'aurait adoubé. Mais, il faut rendre à César ce qui est à César. Anthony Vacarello à performer lors de cette présentation et a su tendre vers cette élégance tant recherchée. Surement, le temps et l'expérience ont su bonifier son âme créatrice. Merci Monsieur Vacarello d'avoir honoré l'essence même de la maison Saint-Laurent.
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Saint-Laurent

Automne/Hiver

2022/2023

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Valentino Automne/Hiver 2022/2023 par Pier Paolo Piccioli
Le Rose & le Noir aurait pu être le titre évocateur pour condenser en deux mots la présentation Valentino Automne/Hiver 2022/2023. Réducteur peut-être. Un tantinet littéraire. Voire "Stendhalien". Pier Paolo Piccioli a surtout souhaité sublimer une tonalité singulière pour la garde-robe hivernale : le rose fuchsia/magenta. Une tonalité spécialement conçue pour cette collection. Les silhouettes pétrole venant contrebalancer cette note "colorielle" étincelante. Le dossier de presse simplifie son propos en notifiant "The Pink Collection". Quatre-vingt-un looks dont trente-trois Anthracite. La salle du carreau du temple a été entièrement repeinte en magenta. Murs, sol, colonnes, estrade. Magenta, magenta, magenta. On en veut partout. Pier Paolo Piccioli ne souhaite aucunement diluer son concept stylistique. Il va droit au but. On affirme. On matraque. On rajoute. Une tonalité disséquée, décortiquée, répétée. Pourtant, au sein de nos sociétés contemporaines, dites évoluées, le rose a longtemps répondu à une connotation féminine. En gros, le rose pour les filles et le bleu pour les garçons. Ici, le discours demeure transposé, rectifié. Cette sphère a été totalement raturée pour se surélever vers une autre plus ouverte. Une couleur n'appartenant plus à un seul genre mais à tous : femmes, hommes, trans, non-genrés. L'ouverture d'esprit prime. Toutefois, dans notre monde terre à terre, il prendra beaucoup plus de temps à s'imposer. C'est ainsi. Le casting demeure totalement métissé avec une diversité de couleurs de peaux. Totalement inclusif par ses différences d'âge, notamment en croisant les modèles Violetta Sanchez, Penelope Tree ou Kristen McMenamy. Une présentation ou la majorité des invités se jettera avec gloutonnerie sur des vêtements aux saveurs de délicieuses confiseries. Etant donné que le fuschia prédomine, il n'est plus question, ici, d'imprimés, de tie & dye, de tartans, de carreaux ou de fusion de couleurs. On se focalise sur les formes, les tombés, les découpes, les jeux de matières, les broderies, les agencements stylistiques. Si l'aversion pour le magenta parait trop forte, la maison Valentino propose de se réorienter sur trente-trois sublimes looks entièrement ébène. Obscur et ténébreux. C'est le mannequin Mary Ukech qui foule la première ce sol fuchsia. Elle sublime cette interminable robe dont le bustier forme une savoureuse vague. Divine. Le balconnet à fines bretelles, du second look, est rikiki. Juste de quoi cacher la poitrine. Avec un nœud rectangulaire. La jupe s'évase aux mollets pour dévoiler les étonnants escarpins compensés, élançant la silhouette comme jamais. Le manteau suivant apparait d'une simplicité déconcertante. Epaules légèrement tombantes, il se noue à la taille par un étroit mais longiligne nœud rectangulaire. Une chemise en mousseline, col Mao, manches bouffantes, laisse croustiller la totalité du buste de la demoiselle. Son pantalon large laminant le sol avec déférence. La mini robe crinoline est à se damner. Elle dessine des jambes de gazelles. Des mousselines transparentes laissent découvrir quelques poitrines mais aussi des pectoraux bien dessinés. Des découpes au bistouri peuvent lacérer un bustier en un effet bondage, finalisées par un jeu de charmants nœuds. Des aplats de fleurs s'intercalent sur une minirobe entièrement pailletées de sequins. Un fourreau se bâtit autour de coroles s'apposant les unes auprès des autres. Un rendu complètement couture. Un gigantesque manteau, en taffetas, s'offre un feu d'artifice de gerbe de plumes d'autruche. Une vision suspendue comme une nuée de nuages. Une collection sensationnelle qui restera dans les anales. Un fuchsia magnifié. Un magenta exalté. Un rose tout simplement honoré chez Valentino pour cet Automne/Hiver 2022/2023. Probablement, et cela peut sembler cliché, mais après tous les cataclysmes planétaires, Pier Paolo Piccioli a surement désiré voir la vie en rose. Quelle idée saugrenue mais merveilleuse. De célébrer le bon côté de la vie. Le rose n'apparaissant pas comme une couleur aisée à enfiler tous les jours, montre qu'avec un peu d'audace, on peut la sublimer, la transcender. Une ode magistrale. Une déclaration d'amour.
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