Le
regretté et feu Alexander McQueen a toujours chéri, avec ardeur, dévoiler
ses créations démentes à Paris. Sa ville de cœur. La ville de tous ses fantasmes.
Une capitale inspirante, rêvée, nombril du business de la mode. Sarah Burton
s'est résolue à rapatrier la présentation Alexander McQueen Printemps/Eté
2023 au sein de la capitale britannique. Un choix discutable mais compréhensible.
Toutefois, intelligible parce que son studio de création demeure basé à
Londres. Divulguer à Londres reste probablement un clin d'œil et flashback
aux années studieuses d'Alexander Lee McQueen. Ses années à la Saint-Martin
School. Avec cette vue impressionnante sur la Tamise, on décèle l'énergie
de la City. Le ciel céruléen, étincelant, paraît énigmatique. Un moyen de
réaffirmer l'identité intrinsèque maison, ce fameux ADN qui demeure totalement
ancré dans cette Grande-Bretagne imaginative. Il n'y a pas de rivalité entre
les deux villes, mais seulement un lien indéfectible et réciproque. Un mémento
en somme. Une sphère majestueuse, cristalline, en forme de bulle de savon,
détone. Une rampe immaculée, interminable, contourne ce le lieu éphémère.
Les bâtiments historiques dénotent, diffusant force et magnétisme au lieu.
Monumental. Magistral. La première silhouette affleure à peine le plancher
du podium qu'elle vous épie, vous observe, vous scrute avec son immense
iris bleu glacial. A l'allure de graffiti. Elle affronte l'audience et argüe
: "Regarde-moi, je vais t'en faire voir de toutes les couleurs". Cette robe
asymétrique ébène en jette. Déconstruite, elle s'appuie sur un Marcel seconde
peau et découvre la jambe dès la naissance de la hanche. Sur le mannequin
Colin Jones, en version immaculé, la prunelle s'incarne d'un rouge presque
diabolique. Voire maléfique. Le visage blême de Miss Jones tranche avec
cette "Outfit" à l'inspiration mi-ange/mi-démon. Imprimé sur un costume
deux-pièces, l'allure est enchanteresse. Mon look préféré. Chaque tenue
apparait ultra structurée, charpentée et équilibrée. Les épaules demeurent
d'une beauté sans faille. Elles restent rectilignes, ne tombant jamais.
Les mesures idéales. Beaucoup de smokings sont exécutés et interprétés de
divergente manière. Il peut s'incarner en boléro avec un bâti en V, composé
d'un pantalon taille basse, restructurant le contour de hanche. Strict mais
charnel. Un suivant s'édifie autour de l'idée d'une combi d'aviateur. Comme
sur Victoria Fawole. Un autre se découpe de triangles isocèles au niveau
des reins laissant apparaitre un déhanché sensuel. Il peut aussi s'exécuter
en manteau longiligne, à la Matrix, sur Célina Ralph. Un dernier se bâtit
autour d'une robe au bustier asymétrique. Toujours de tonalité anthracite.
Un body, ultra moulant, de tonalité carmin, galbe l'anatomie comme jamais.
Mieux vaut être athlétique pour enfiler cette charmante combinaison qui
donne une allure de super héroïne. Un autre body, totalement sombre cette
fois, s'offre la douce folie d'emmanchures mandarine dont l'inspiration
pourrait être celle de rouleaux de lavages automatique. Une intonation qui
cédera une énergie solaire. Une ultime couleur, puissante, investit le podium
: le bleu céruléen. Sur un simple costume deux pièces ou une robe bustier
en cuir, on reste fasciné par cette tonalité glaciale. La même que l'iris
du look d'ouverture. La silhouette architecturée parait comme le point central
de cette présentation. La ligne corporelle est toujours respectée et magnifiée
par des jeux de coutures hyper sophistiqués et toujours invisibles. La taille
se marque par un corset en cuir à l'allure de selle à cheval comme sur Amanda
Murphy. Ce dernier peut se teinter d'une intonation corail.
A se damner. Une jupe asymétrique, en cuir carotte, s'incruste aussi d'un
corset ton sur ton. Une robe en tulle lactescent s'affaisse en cascade pour
laisser flotter quelques volants au vent. Le cuir d'une extrême souplesse
demeure un incontournable pour ce Printemps/Eté 2023. Il investit perfecto,
Marcel, combinaison "catwoman", robe filiforme ou jupe/perfecto. Intemporel.
Un imprimé ultra-coloré, à l'inspiration japonaise par ces iconographies
de poissons-chat, rouge-gorge, geishas ou fleurs de pissenlit, assiège une
combinaison type Léotard, une robe de soirée démente ainsi qu'un bustier/maillot
une pièce. Le top britannique Naomi
Campbell fera son petit effet avec une combinaison seconde
peau, rebrodée entièrement de milliers de perles de verre aux accents mordorés,
Camel et anthracite. Une pièce extrême. Totalement couture. Avec Sarah Burton
aux commandes, on peut être assuré, chaque fois, d'une véritable proposition
de prêt-à-porter de luxe. La maison Alexander McQueen travaille les proportions,
les découpes, les broderies, comme si chaque look incorporait le domaine
de la couture. Le corps demeure toujours la base de Sarah Burton. Elle le
magnifie avec doigté par des découpes complexes, toujours aux scalpels et,
aux millimètres. On ne peut être désappointé par son génie, son minimalisme
maitrisé, ses imprimés créatifs inédits et surtout d'une minutie inaccoutumée.
Un pur artisanat à l'anglaise.
YG
AlexanderMcQueen
Printemps/Eté
2023
YG
YG
Bottega
Veneta Printemps/Eté
2023
par Mathieu Blazy
Bottega
Veneta reste par définition la maison italienne qui excelle dans la création
du prêt-à-porter de luxe. Stricto-sensu, toutes les pièces proposées par
Mathieu Blazy semblent d'une portabilité sans faille. Faciles. Stylées.
Elégantes. Gracieuses. Avec un choix de couleurs adéquats et inédites. Avec
pour leitmotiv : démesure et clinquant y demeurent bannis. Il n'y a pas
d'effet bluff sur le podium. On focus seulement sur le vêtement. Le casting
éclectique ne mélange aucunes stars des podiums actuels. Sauf l'apparition
de Kate Moss, l'icône ultime. Le podium laqué arc-en-ciel, réalisé par le
plasticien italien Gaetano Pesce, semble une allégorie ludique du chemin
de l'enfance. Des tonalités espiègles pour trancher avec une collection
qui se veut complètement néo-classique pour cet été 2023. Le prêt-à-porter
Printemps/Eté 2023 amalgame, une fois de plus, des looks féminins et masculins.
Ils se télescopent et matchent à merveille. Les pièces en cuir sont fantastiques.
Le pantalon masculin vert empire s'accompagne d'un simple tee-shirt blanc
et un blazer. That's the look. Un deux pièces vanille demeure semblable
à une matière textile alors qu'elle est confectionnée dans un cuir d'une
souplesse incroyable. Une robe chocolat s'amuse de découpes dissymétriques.
Un trench enfilé sur une jupe, toujours en cuir, s'estampillent d'un effet
matière crocodile. On perçoit une véritable technicité maison pour transformer
les cuirs telle une suave caresse. Un pardessus, une veste croisée double
boutonnage et un bermuda demeurent confectionné à partir d'un apparent tissu
gris chiné, alors que c'est un cuir ciré opaque. L'effet d'optique reste
totalement bluffant. Des découpes réalisées au laser laissent naitre des
fleurs en trois dimensions sur une robe bustier couleur cochenille ou sur
une jupe crayon Aigue-Marine. Le cuir investit de nombreux accessoires.
De manière visible. Parfois imperceptible. Sacs et chaussures recouvrent
le traditionnel tissage en cuir maison. Ils peuvent s'épaulent en duo. Comme
le maxi cabas alcalescent escorté d'un petit sac à main. On s'amuse de conjuguer
souplesse et rigidité. Une sacoche à l'allure "palourde" fera la joie d'une
"modeuse" pointue. Un autre en forme de ballonnet fera le bonheur d'un fou
du ballon rond. Les besaces masculines prennent des conformations de cruches
géantes. Presque de balluchons. Elles harponnent toutes tailles. Les couleurs
s'ancrent de vert-de-gris, grège ou neige. Un manteau, en cuir grenat, se
tisse de milliers de filins en cuir laiteux et bordeaux. Donnant un effet
de plumes des plus réels. La doublure intérieure incorpore le tissage en
cuir maison. Une veste architecturée, gris chiné, au col légèrement cheminée,
enserre la taille comme l'exécuterait le fameux tailleur bar de Christian
Dior. C'est en cela que l'allure Bottega Veneta pourrait aussi se définir
par "le charme secret de la néo bourgeoise éclairée".
Les tee-shirts et marcels incolores demeurent des basiques intemporels que
l'on marie avec pantalons ou robes aux fortes intonations picturales. Quelques
marcels se tissent de motifs aux doux accents d'algues des fonds marins.
Presque de posidonies. La fluidité textile apparait comme un argument pour
cet été 2023. Une robe anthracite, épaules nues, col en V jusqu'au nombril,
se couple d'une soie opaque noire, dont les effets de matières renvoient
aux effets de lumières recherchés par le défunt Pierre Soulage. Des robes
asymétriques aux imprimés alambiqués font leur apparition sur le podium
serpentin. Elles se composent de figures organiques contemporaines, aux
apparences de palmes, vagues, éclisses, en fonction de son impétueuse imagination.
Ces " prints " inédits rehaussés en leurs périphéries de macramés, anoblies
de franges en perles de verre. Comme un effet raphia. Le citron, le vert
sinople, l'abricot humectent ces robes engendrant un effet pictural endiablé.
Un travail d'impression textile qui se rapproche vigoureusement de la couture
française. Un complet masculin ose les rayures zébrées amplifiées. Une bouffée
d'air que l'on pourrait subodorer provenir de certaines cultures africaines.
Mon coup de cœur se résume dans ce look graphique, masculin, de couleur
turquoise, rayé de-ci-delà de zébrures sang, englobant, d'un seul tenant,
pantalon ample et col roulé cheminé. L'imprimé est simplement génial. Cette
saison, Bottega Veneta s'est aventuré vers des lignes sobres, strictes,
mais pas seulement. On œuvre, aussi, vers des volumes plus décontractés,
respectant inlassablement le corps et sa bonne marche. Il y a une aisance
certaine à cheminer avec de nombreuses pièces dessinées par Mathieu Blazy.
Une partie de la collection dégage une maturité sans vergogne qui véhiculera
une remarquable aura à ceux et celles qui auront la chance de pouvoir s'y
glisser. Les constructions stylistiques des derniers passages ainsi que
leurs tonalités chaudes attestent d'une envie prononcée pour une certaine
visibilité. Le discours de cet été progresse vers un vêtement au luxe discret
et désacralisé mais avec une pointe d'aliénation maitrisée.
YG
Bottega
Veneta
Printemps/Eté
2023
YG
YG
Chanel
Printemps/Eté 2023
par Virginie Viard
Pour
illustrer la collection de cette saison Printemps/Eté 2023, Virginie Viard
s'est attaqué à la thématique du cinéma. Vaste sujet. Le set design demeure
sombre, obscur, profondément ténébreux mais chic, classique, élégant. Le
noir et blanc, duo "colorielle" incontournable de Mademoiselle Chanel, aspirent
cet espace avec voracité. Une atmosphère presque nocturne. Les invités sont
installés sur un interminable gradin central, entouré d'un podium à l'allure
de piste athlétique. Un marathon incontestable se profile pour les mannequins
qui fouleront cet interminable podium. En attendant le début de la présentation,
des projections filmiques de statues baroques, de jardins à la françaises
et d'appartements cossus défilent sous les yeux. Avant le début du show,
un court métrage avec l'actrice Kirsten
Stewart est projeté. Atmosphère et clin d'œil à cette
fidèle ambassadrice maison. Rianne
Van Rompaey,
une des muses maison, ouvre le show avec un sweater noir et blanc, composé
d'un collage d'effigies de Gabrielle Chanel mêlées à ses autoportraits.
Un joli hommage pour ce mannequin star de la part de Virginie Viard. Ce
pêle-mêle amalgame aussi diverses inspirations pour cette collection Chanel.
Une longue cape en mousseline, extra fine, se noue autour du cou, maintenue
par un camélia anthracite. Des images tirées du film "L'année dernière à
Marienbad" avec l'actrice Delphine Seyrig, virevoltent sur cet écran à 360°.
Une ambiance énigmatique. Spectrale. Hypnotique. Un film qui n'a pas été
choisi au hasard. La raison en est simple. Gabrielle Chanel avait eu l'honneur
et la joie de créer les costumes pour Delphine Seyrig pour ce rôle. Alors,
venir trifouiller le passé cinématographique Maison, pour réinterpréter
des looks Chanel oubliés, quelle idée séduisante. Excitante même. La veste
de tailleur, en tweed nervuré nuit, portée avec prestance par Loli
Bahia
se conforme, en background, par une infime queue de pie. La tonalité virginale
prend de suite le pas de cette présentation. Eclatante sur une veste, elle
insuffle à l'allure ce climat juvénile. Peut-être, les babies de Rolf
Schrader,
rehaussées de longues chaussettes incolores, oriente ma pensée vers cette
imagerie de collégienne japonaise. Un simple caleçon, en cotonnade, se complète
d'une veste en tweed crème et d'une chemise Lavallière. Sensuelle attitude
sur Mila
Van Eeten.
Les plumes d'autruches alcalescentes s'emberlificotent sur le col en tweed
crème, dispensant une touche éthérée à Evie
Saunders.
Beaucoup de tenues usuelles mais glorifiées par des détails que seul Chanel
peut allouer. Les colliers de perles, les broches en strass diamant, les
lignes perlées à l'oreille se confrontent, se voisinent, même si elles demeurent
dans une configuration discrète. Le nœud, code identitaire maison, s'épingle
sur le haut d'un long gant, les brides d'un escarpin ou simplement dans
les cheveux. Le manteau d'Adut
Akech se parsème de fugaces pois et se ceinture à la taille
par un double camélia cristallin. Jill
Kortleve
se dandine dans ce "crop top" tamponné du double C entrelacé, de pois et
de camélia. Mettant en valeur une poitrine bien replète. Idem pour sa mini-moulante.
Malgré cela, le blanc et le noir résonnent à merveille tel un écho. La veste
de smoking s'incarnera comme la pièce rêvée pour se rendre dans un festival
cinématographique. Ou simplement dans un diner mondain. Un autre, brodée
de sequins crème, se tamponne, très discrètement, du fameux logo entrelacé.
Sur la gracieuse Mahany. Quelques pièces aux tonalités colorées trottinent
les unes après les autres comme un tweed moucheté arc-en-ciel, un pied-de-poule
bubble-gum, un pull en cachemire parme, un sac 2.55 ventre de biche, un
marcel jade ou une robe manteau fuchsia. Un imprimé "coups de pinceaux",
au tie&dye dragée, pèche et saumon, s'accole à une veste dont la coupe reste
rectiligne. Des rayures bayadères investissent une longiligne robe plissée.
Pour son premier défilé Chanel, en seize années de carrière, Irina
Shayk
porte une robe en mousseline dont les manches volantées lui prodigue un
air danseuse de flamenco. Aie aie aie. Les sequins demeurent toujours un
hit inéluctable et blindent vestes, robes, pantalons. Parfait pour une deuxième
partie de soirée. Une robe lactescente, sans manches, se couvre entièrement
d'un plissé bénitier. Avec le sac étoile de mer Gold, on est paré pour une
ballade rayonnante en bord de mer. Deux, trois robes en lamé doré traversent
le podium comme sur l'hypnotique Akon
Changkou.
Les transparences s'incarnent dans des dentelles légères. Elles se rebrodent
de micro perles argentées ou de paillettes nacrées, libérant un effet irisé
digne d'une nymphe. Les ultimes passages s'incarnent dans un noir pur. Classe,
élégant, joyeux et festif. Avec la micro chaine dorée Chanel, entourant
la taille, et égayant chaque silhouette encore plus. Dix minutes de pur
Chanel ou les silhouettes demeurent plus désirables les unes que les autres.
Une présentation qui se destine formellement pour des soirées, cocktails,
diners en ville, avant première, vernissages et même d'amusement à coco.
En cela, il y aura tout ce qu'il faudra dans le vestiaire Chanel Printemps/Eté
2023 pour briller en société.
YG
Chanel
Printemps/Eté
2023
YG
YG
Chanel
Cruise Printemps/Eté
2024 par Virginie Viard
Los-Angeles,
cité rêvée. Cité des anges. Mégalopole entièrement dédiée et dévouée à l'industrie
du rêve pelliculé, le cinéma. Une ville fantasmée par de nombreux voyageurs
mais dont on ne peut omettre ses travers ravageurs. Toutefois, je ne suis
pas ici pour les énumérer. Qui n'a pas en tête ces longilignes palmiers
bordant des avenues verdoyantes ; Qui n'a pas en tête ce soleil harassant
venant léché les peaux halées de ses habitants ; Qui n'a pas en tête ces
cyclistes et skateurs venant se balader sur Venice Beach ainsi que ces corps
bodybuildés, galbés à souhait, s'exhibant sur les plages infinies du pacifique
; Qui n'a pas en tête ces cabanes sur pilotis des célèbres sauveteurs en
mer ou ces voitures de sport dévalant Sunset Boulevard. Des clichés bien
réels alimentant souvent une illusion fantasmée. Est-ce peut-être pour une
de ces raisons que Virginie Viard a convoité transposé l'esthétisme de Los-Angeles
au travers cette présentation Cruise 2023/2024. Sur un immense "playground"
de Basket-Ball, aux couleurs de la maison Chanel, le double C trône au centre,
agrémenté de la mention Chanel latéralement. Je confirme qu'il faut bien
être à LA ce soir. D'ailleurs, un des airs musicaux diffusé sur la bande-son
s'évertuera à déclamer "Everybody wants to be in Hollywood". Une immense
toile projette des images en noir et blanc d'Alma Jodorowsky qui, d'une
volonté de fer, agite ses haltères avec une dévotion folle. Avec ce regard
volontaire. Puis, des liasses de palmiers cheminent sur cette toile blanche
de cinéma OutDoor. Une excellente entrée en matière pour laisser apparaitre
la silhouette athlétique d'Anna Ewers. Un look totalement fitness. Totalement
Chanelissime. Le micro short seventies, aux liserés strassés, s'accroche
d'une broche camélia à la poche et d'une micro chaine Chanel enserrant la
fine taille. Avec sa brassière au contour pyramidale et ses guêtres anthracite
étincelantes, tombantes sur ses tennis incolores, Anna possède l'un des
looks caractérisant une californienne "Hype" se rendant à son cours de gym.
Sans oublier le micro sac à dos matelassé en cuir pure Gold. Bling Bling.
Sur l'air de la bande originale du film "Basic instinct", Anna dévale les
escaliers avec empressement et tonicité. L'énergie californienne. Un second
écran déclame, en typographie Arial, le nom des mannequins défilant sur
le podium. Que des stars de la profession. Comme lors d'un véritable match
de basket-ball. Le maillot une pièce de Vittoria
Ceretti
s'échancre à la taille par deux comètes argentées. Les deux manchettes,
au double C, diffusent cette note absolument gymnique. Flashback sur la
comédienne Jamie Lee Curtis donnant un cours de fitness dans le film "Perfect"
avec John Travolta. Un culte du corps avéré et exalté. Tel que celui d'Adut
Akech
avec ce maillot une pièce purement Gold, patronné d'un voile de mousseline
charbon s'envolant à la brise du soir. Le micro short peut se réaliser dans
un cuir tendre tel que celui porté par la jeune australienne Angelina Kendall.
Les cheveux demeurent crêpés et ondulés pour dispenser un volume et une
contenance à la Farrah Fawcett. Beaucoup de blondes sur le podium, référence
aux abondantes stars du grand écran dont la blondeur a traversé les plus
grands films hollywoodiens. Peut-être aussi un clin d'œil à la comédienne
Margot Robbie, égérie maison, dont le rôle de "Barbie" lui vaut un coup
de projecteur mondial. Luna Bilj, choupette de Karl Lagerfeld, scintille
de milles feux avec sa robe pailletée argentée incrustée d'un simili corset
pailleté doré. Avec des Babies dissimulant des leds dans les talons. L'or,
l'argent, le noir et le blanc demeurent les couleurs conductrices de ce
show à l'américaine. La veste iconique, en tweed, se teinte de couleur de
guimauves : poussin, parme, rose tendre, violine. Presque des tonalités
de levers ou couchers de soleil, c'est selon le point de vue. La robe en
dentelle florale de Sarah
Grace Wallerstedt incarne parfaitement l'idée d'un coucher
de soleil sur LA. Un tie & dye s'étirant du pourpre au jaune scintillant.
Beaucoup de camaïeux de rose. Des sequins à gogo allant des tonalités violine
au rose poudrée. On est absolument dans la tendance de la Barbie Girl. Quelques
tissus éthérés ou le vocable Chanel se grime finement, presque imperceptible.
Les imprimés sont polychromes et bariolés. Des camélias gigantesques, aux
couleurs de l'arc-en ciel, assiègent des mousselines vaporeuses. Des "Coco
Chanel Paris", balayant tout le spectre des couleurs, assiègent une robe
noire. Avec un gilet anthracite sertit de broderies feux d'artifice. Des
palmiers sur fond de Sunset, agrémentés de sequins, incrustent un chandail.
On est entièrement dans le Los-Angeles célébré. Le N°5 embellit un tee-shirt
oversize mais s'immobilisant juste au dessus du nombril. Le short prend
des proportions de boxeur. Le skate-board anthracite, large, s'appose d'un
double C propageant cet esprit de "coolitude" californienne. Un sweater,
en cotonnade rose pastel, peut présider de robe ultra courte sur Malika
El Maslouhi. Simple et efficace avec un collier de perles,
une chaine dorée et un collier ras du cou au double C entrelacé. Le jogging
en satin bleu ciel sur Jade Nguyen scintille comme jamais. Les solaires
se font masques. Quelques clins d'œil à Los-Angeles avec particulièrement
ce sac "étoile" qui demeure l'empreinte identitaire d'Hollywood Boulevard.
Les strass diamant recouvrent entièrement des escarpins. Du clinquant à
souhait. Les vestes et manteaux du final se tapissent de sequins dorés,
argentés pour une pyrotechnie qui se veut des plus fantasmagoriques. Certaines
silhouettes peuvent remémorer celles d'actrices phares. Comme celle d'Amar
Akway
totalement Grace Jones dans le film "Dangereusement votre" ; ou comme celle
de Felice
Nova Noordhoff
absolument Kim Basinger dans "9 semaines ½". L'alliance du noir et blanc
apparait comme un classique qui fonctionne inlassablement. Notamment, pour
les looks du soir. Vivienne
Rohner
clos la marche dans une combinaison/pantalon alcalescente, 100% Chanel.
Avec une dépêche personnelle défilant sur l'immense écran : Happy Birthday
Vivienne. C'est aussi l'esprit de famille que Chanel célèbre à Los-Angeles.
Des vêtements magiques, exécutés dans une veine couture, qui impulsent une
envie d'exploration jusqu'au tréfonds de cette ville désirée et énigmatique.
Ca claque.
YG
Chanel
Cruise
Printemps/Eté
2024
YG
YG
Dior
Printemps/Eté 2023
par Maria Grazia Chiuri
Des
grottes artificielles, en carton lamellé, ornent le set design de la présentation
Christian Dior pour le Printemps/Eté 2023. Des arcades, des pans de murs,
des troncs d'arbres jonchent, de-ci-delà, le chenal des mannequins. Un couple
de danseurs classiques se déhanche paisiblement dont la gestuelle demeure
saccadée et discontinue. D'autres se dandinent tels des faunes dans un songe
enchantée. La musique "Solar Plexus Chakra for Energy" de Goia Hz se répand
laconiquement alertant de l'imminence de la présentation. Il se dégage presque
une atmosphère onirique et chimérique. Un apaisement se répand imperceptiblement
dans cette salle irréelle. Maria Grazia Chiuri a requêté le talent de la
plasticienne Eva Jospin afin de reconstituer un lieu désirable, entre jardin
fantasmé et paradis perdu, entre ruines romantiques et manoir du XVIIIème
abandonné. On médite au mythe du paradis perdu, de l'Eden recouvré surgissant
sous nos yeux. Freja Rothmann, tête rasée, totalement "Skin", traverse ce
dédale d'excavations en carton, vêtue d'une tenue noire, de la tête au pied.
Une brassière se noue d'un longiligne nœud en satin s'achevant sur le nombril.
Sa jupe en dentelle fleurie offre une amplitude convexe par le biais de
paniers latéraux joliment dissimulés. Un brin ténébreux romantique. La tonalité
noire envahit tous les premiers modèles. Mais, révèle surtout des détails
méticuleux. Minutieux et précieux. Les fleurs morcelées telles des broches
envahissent la totalité d'un bustier ; les froissés s'empilent les uns sur
les autres comme sur une robe, sans manches, dont la configuration volumineuse
diffuse une tangente pyramidale ; les mailles tricotées risquent des transparences
olé-olé sur un pull tricoté, col circulaire. Des macramés de dentelles investissent
cache-cœurs et shorts pour emprunter des airs de lingerie affriolante. Les
tissues résilles (ou filet) laissent entrevoir les courbes souvent sensuelles
de celles qui les présentent. Un air de dévergondage propret. DevergonDior
? L'esprit lingerie sera fort présent toute au long de cette présentation.
Les divers types de dentelles usitées n'y sont pas étrangers. Il y a un
véritable désir de séduire les femmes. Mais aussi d'auto-séduction. Pour
concéder finalement à toutes les femmes encore plus d'"empowerment". Une
robe rigide, à la forme panier, s'agrafe d'une myriade de corolles florales.
Très XVIIIème. D'ailleurs, Maria Grazia Chiuri a étudié avec précision et
attention le vestiaire de Catherine de Médicis pour en tirer des formes
les plus appropriées pour un été 2023 qui se voudra rétro-historique. Toutefois,
il s'avère que ces fameuses robes paniers seront, cependant, bien éloignées
des préoccupations actuelles. Des pièces seulement pour se divertir. Se
donner un look. Quelques imprimés récupèrent l'idée de plans de la ville
de Paris. On peut y lire les lieux comme place de l'Alma, avenue Kléber,
avenue de Messine, boulevard Haussmann, avenue Matignon. Seulement des rues
chics. Avec la maison Christian Dior au centre. Pas bête la guêpe. C'est
le top français Alix
Bouthors qui décroche le trench blanc cassé entièrement estampillé
du plan de Paris. Les chaussettes sont en résille et les babies se lacent
de fines sangles jusqu'aux genoux. Un air de Mercredi Adams avant la sortie
de la série éponyme qui cartonnera sur Netflix. Des patchworks de dentelles
crème et ébène s'amalgament sur une robe au contour "papale", enfilée par
Mila
Van Eeten.
Les dentelles en cotonnade neigeuse ennoblissent manteaux, jupes, mini short
et capes. Intemporel. Quelques délicates broderies florales, totalement
d'inspiration chinoise, se crochent sur une simple veste anthracite col
en cercle. Des estampés, d'inspirations XVIIIème, appréhendant herbiers
et faunes animales, anoblissant robes, pantalons et bustiers. Parfaits pour
éblouir l'amoureux ou une cohorte d'amis. Quand Maria Grazia les exécute
sur un fond ébène, les motifs végétaux déflagrent en mille couleurs. Ils
sont brillants, chatoyants, éclatants. Des signes zodiacaux, composés du
taureau, cancer, lion, gémeau, verseau, se déploient tel un horoscope sur
la robe longitudinale de Rachel Marx. Il est notoire que Maria Grazia Chiuri
apparait comme férue d'astrologie. Une parka anthracite à capuche récupère
le fameux matelassé "cannage" maison. La version blouson demeure préférable
pour un second choix. Très peu de sacs mis en avant cette saison. On est
focus sur les pièces vestimentaires. Les plissées prennent différentes formes
comme des froncés classiques ou des losanges trois dimensions, sur une jupe
mini. Quelques pantalons filiformes, bustier en V et chemises oversize reconquièrent
avec fantaisie les illustres rayures bleu layette ; La version champagne
sera plus fun. Un baggy Kaki s'enfile sur un manteau en laine anthracite
surfilé de motifs floraux à ses emmanchures. Du denim se brode, lui aussi,
de fleurs en tout genre. Toutefois, le travail Dior s'affiche en lettre
d'or sur les derniers passages. Maria Grazia a sollicité quelques spécialistes
du tissage de la paille afin d'effectuer un travail artisanal phénoménal
sur les dernières pièces de la collection. Un tressage méticuleux pour créer
un trench, un peu rigide soit, mais rehaussé d'abondantes fleurs 3-dimensions
en paille ; le tee-shirt et la jupe de Puck
Schrover
se bâtissent par le biais d'une architecture d'arabesques organiques, toujours
en paille. D'incroyables œuvres d'art qui peuvent entrer dans le cadre de
la haute-couture. Maria Grazia a véritablement opté pour un vestiaire pratique
à appréhender, avec des choix de tonalités qui se veulent simple pour cet
été 2023 : du blanc, du crème, du bleu marine, du beige, du noir et quelques
imprimés fleuris. Ce sera tout. Mais suffisant.
YG
Christian
Dior
Printemps/Eté
2023
YG
YG
Louis
Vuitton Printemps/Eté 2023
par Nicolas Ghésquière
Retour
cour carrée du Louvre pour la présentation Printemps/Eté 2023 de la maison
Louis Vuitton. Un lieu qui fait battre le cœur de nombreuses collections
prêt-à-porter Maison, et qui a été longtemps utilisé par les maisons de
couture pour dévoiler leurs présentations sous d'immenses chapiteaux immaculés.
Spécialement lors des années 80 et 90. Un flash-back audacieux et enchanteresse,
notamment pour les générations précédant les milléniales. Toutefois, en
2023, le chapiteau s'érige de manière contemporaine, épineux, voire belliqueux
avec son pourtour de métal anguleux, anobli de dalles en verres opaques.
La tonalité écarlate se mêle, en ses contours, par un jeu de tentures qui
se déploieront au moment opportun. Une scénographie inédite. En son milieu,
de gigantesques pétales de fleurs vermillon offrent des pistils aériens
flottant tels des hallebardes de chevaliers prêts à en découdre. Un cirque
moderne, glacial au premier abord, qui a été conçu par l'artiste contemporain
français, Philippe Parreno. Cependant, la production a été confiée à James
Chinlund, designer reconnu pour ses constructions de sets incroyables pour
le cinéma hollywoodien (Dernièrement pour "The Batman"). Le summum du set-design.
On en prend plein la vue. D'un coup, un tempo musical acéré retentit tel
un métronome. Régulier et rapide. Les rideaux rouges éclosent doucement
sur ce pourtour à 360°. La première silhouette apparait sur cette interminable
passerelle. Hoyeon
Jung, star de la série télévisée "Squid Game" ouvre à
nouveau le show. Sur la musique remasterisée de "King of my Castle" de Roy
Malone Kings, elle dévale la pente d'un pas ferme et volontaire. Cette cadence
infernale sera le leitmotiv de toutes les filles. On carbure. Le top immaculé
d'Hoyeon, sans manches, intègre le design d'un gilet de sauvetage. Indubitablement,
les deux "boudins" frontaux concèdent cette pensée. Cette construction stylistique
s'applique à la jupe plissée telle une bouée assimilée. Quand elle s'incorpore
au col, un effet collerette se dessine. Proéminence stylistique ! Une autre
tendance saute de suite à l'œil : l'effet macro. On focalise et amplifie
un élément, un détail ou un code maison. La fermeture éclair exagère le
format de son zip. Il est disproportionné. Le porte étiquette format XXL
devient sac à main. Distorsion. Les boutons demeurent totalement oversize.
Ils se font soucoupes. Dorés et gravés Louis Vuitton sur le look de Mona
Tougaard.
Argentés sur América
Gonzalez.
Une robe en cuir souple s'harnache de mousquetons dorés, toujours oversize,
agrippant les frêles épaules de Cyrielle
Lalande.
Les ceintures s'élargissent telles des sangles dorsales pour haltérophiles
comme sur Ashley
Radjarame.
Voire un simili corset sur Chu Wong. Les poches en cuir se font extra larges
sur le manteau de Seng Khan. Comme son Zip doré. L'imprimé "Ceinture Rivetée",
tatoué sur un complet en cuir micro perforé, peut prendre une dimension
puissance dix. Un effet étrange même si le concept ex-nihilo demeure d'une
simplicité déconcertante. Les robes peuvent se froncer de centaine de micros
plissés par le jeu de simples lanières frontales. On peut jouer avec les
proportions corporelles, en laissant une liberté infinie à la silhouette.
Des deux pièces laissent entrapercevoir de méticuleuses découpes géométriques
reproduit à l'infini via une découpe laser consciencieuse. Une finesse extrême.
On s'amuse de l'infiniment petit vers l'infiniment grand. Toujours une allégorie
à la science tant aimé par Nicolas Ghesquière. La géométrie apparait comme
une autre tendance prégnante. Les robes se bâtissent telles des origamis
parfaitement agencées. Bretelles rectilignes. Brassières droites. Lanières
horizontales. Ourlets au laser. Steinberg enfile cette robe verticale, vert
émeraude, à l'allure très Cardin. Avec un micro-jacquard triangulaire japonisant
sur le buste. Ce même tissu investit une robe triangle, griffonnant les
pourtours de broderies "traits de crayons". Les collants, en dentelle florale,
dispensent un air gothico-romantique. L'angélique Fleur Breijer enfile une
robe composée de patchwork en cuir polychrome. Des broderies complexes s'entrechoquent
sur une robe, col en V, régénérée par un savant mélange de perles cuivrées,
sequins rectangulaires turquoise, points en V, perles en verres citron,
perles de bois effilés et sequins quadrilatères émeraude. De la véritable
haute-couture reconditionnée pour un prêt-à-porter de luxe. Les bottines
et bottes en cuir, parfois érigées de semelles en bois, sont édifiées d'un
profilé digne des meilleurs films de SFI. Elles peuvent s'enorgueillir de
micro gem polychrome comme sur Iman Kaumann ; ou de damiers bicolores comme
sur Seng Khan. La petite malle prend des tonalités intenses comme le bleu
Klein ou Turquoise. D'autres sacs prennent la configuration d'ancestrales
besaces médicales. De la divine dentelle, au motif pois, laisse deviner
les charmantes courbes d'Hanna Felding. Vaporeuse apparait la robe d'Akon
Changkou
avec des plumes d'une extrême finesse, pénétrée de paillettes argentées.
Le look d'Apolline Rocco Fohrer s'édifie autour d'une multitude de célestes
pétales irisées. Quelques rivières de gros cailloux multicolores, à la taille
diamant, s'enroulent autours de cous délicats. Les derniers passages s'achèvent
par des robes en cuir souples, sans manches, avec d'amples poches, demeurant
totalement décontractées. La mode Vuitton Printemps/Eté 2023 demeure toujours
pensée pour une femme qui n'a pas froid aux yeux. Même si la majorité de
la direction artistique demeure dans une veine dite "futuriste", elle peut
être abordable pour celle qui aura un tempérament hardi et audacieux. Avec
des coupes inédites et souvent peu communes, Nicolas Ghesquière poursuit
sa quête vers un style vestimentaire hors-norme et borderline. Pourrait-on
le qualifier d'avant-gardiste ?
YG
Louis
Vuitton
Printemps/Eté
2023
YG
YG
Louis Vuitton Cruise Printemps/Eté 2024
par Nicolas Ghésquière
Extravagant
parait le panorama pour la présentation Louis Vuitton Cruise 2024. Face
à la ville de Stresa, au milieu du lac Majeur, Nicolas Ghesquière a jeté
son dévolu sur les jardins extraordinaires d'Isola Bella pour émerveiller
ses hôtes d'un soir, triés sur le volet. Une place fabuleuse, fantasmagorique
et baroque. Cet hôtel particulier dévoile avec raffinement toutes les dispositions
exigées pour pénétrer un univers fabuleux laissant place à un large imaginaire.
Un lieu rare, accessible seulement à quelques privilégiés. Un endroit ou
se dessine la quintessence du baroque italien avec ses chimères effrayantes,
ses architectures singulières, ses statues de dieux et déesses romaines,
ses jardins luxuriants bordés d'arbres centenaires et de pelouses d'un vert
émeraude. Cette collection Cruise 2024 pourra se targuer du plus bel écrin
qu'il soit. Nicolas Ghesquière aime toujours confronter les différentes
ères terrestres pour engendrer des anachronismes perplexes. Mettre en parallèle
des vêtements d'aujourd'hui dans des lieux respirant un passé trouble et
révolu, n'y a-t-il pas plus belle dédicace et traces de décadence ? La bande
son qui débutera par un air Des contes d'Hoffmann (Acte 2) finira, elle
aussi, par dévier vers un timbre de rave technoïde (Poney de Vitalic). Confrontation
des cultures musicales. Samille Bermannelli, aux longues dreadlocks décolorées,
ouvre le show d'un pas affirmé. Sa veste queue-de-pie, à collerette au contour
de toile d'araignée, s'enjolive d'un imprimé "virgules virevoltantes", dont
la matière n'est rien d'autre que du néoprène. Un tissu technique en caoutchouc
synthétique. Rien de très écologique. Cela me remémore, néanmoins, la collection
prêt-à-porter Balenciaga Printemps/Eté 2008 pour laquelle Nicolas Ghesquière
avait œuvré, en valorisant de nombreux looks avec cette matière de caoutchouc
pour créer jupes, tops et combinaisons. Son pantalon ample, bleu électrique,
s'offre une matière légère comme un satin de soie, plus commode pour se
remuer. Avec un renouveau des baskets. Montantes cette fois-ci. La combinaison
de plongée ou "shorty" fait son coming back. Le sac alcalescent, agrippé
d'une main, au monogramme Vuitton, prend la forme d'un sac de plongée. Nicolas
Ghesquière explore et flatte l'élément primaire, à la base de la vie, l'eau.
Le néoprène revêtit un boléro qui se rehausse, à la taille, de plissés à
la forme de nageoires de poissons. Des gouttelettes d'eau au format 3D investissent
son buste. Une seconde veste queue de pie, toujours en néoprène, s'investît
de nageoires au niveau des manches intérieures. Son imprimé, aux couleurs
vives, allie peaux d'alligators, feuilles d'acanthes, strates terrestres
et bulles pétillantes. Tout se mélange en un inédit patchwork. Les solaires
prennent la configuration de masques de théâtre Japonais (Nô), de catcheurs
mexicains ou d'opéras italiens. C'est selon notre perception culturelle.
Le néoprène investit une minijupe tulipe sur Angelina
Kendall.
Son top demeure ajusté et dessine délicatement le pourtour de sa poitrine.
Les emmanchures laissant apparaitre une construction en ailes chauve-souris.
Mika
Schneider
se voit investit d'un maillot une pièce, bleu Klein, se zippant jusqu'au
cou. Un brin Ursula Andress dans le film James Bond contre le Dr. No. Sa
coiffe extravagante à l'allure de plumes de corbeau dramatise le look. Mi-prêtresse
incas, mi-danseuse du Paradis Latin. Beaucoup de couvre-chefs baroques confectionnés
à partir de matières diverses comme des plumes, du macramé, des fleurs en
organza, des perles, du cuir. Les plumes s'érigent tel le jais d'une fontaine
sur Aivita Muse. Surgissant de la tête, elle se couple de petites têtes
de fleurs ton sur ton. Théâtrale à souhait. Le néoprène s'accouple avec
un tissu jacquard de couleur tabac composant une combinaison fluctuant entre
combi de plongée et de travail. Avec un poinçon ancre de marine sur le flanc.
Cette fois on partira sur des bottines mousquetaires. Le cuir anthracite
se plisse sur une robe Baby Doll comme sur Kristine
Lindseth.
La veste et le bermuda brique demeurent pratiques à porter pour Ashley
Radjarame.
Une cape brodée de perles en verre translucides, aux motifs floraux japonisants,
se maintient au tour de la taille par un jeu de cordes torsadées. Nicolas
Ghesquière se réapproprie des configurations stylistiques déjà vu dans d'autres
de ses présentations comme les manches cerceaux, à la forme tunnel, vu sur
le show printemps/été 2019. Comme sur Sacha
Quenby
ou Mika
Schneider. La jupe d'Agatha, en
mousseline crème, s'additionne de milliers de pétales floraux volant au
vent tel des plumes. La jupe évasée de Cyrielle
Lalande s'enrichit, elle aussi,
de centaines de pampilles dont les imprimés ébauchent des tourbillons, dans
des tonalités de bleu, chocolat, ivoire et acier. Sa chemise, dont le plastron
se croche à l'épaule, se ferme sur l'épaulette gauche par cinq boutons "ancre
de marine". Un imprimé galuchat habille son parement dont l'allure générale
remémore le style victorien. Des robes tubulaires s'entourent de plissés
XL, à 360°. Absinthe sur Oudey
Egone. Or et bleu Klein sur la seconde.
Crème et émeraude sur une troisième. Le pull d'Iman Kaumann, poussin, se
bâtit d'un démesuré col en V jusqu'au nombril. Son micro short anthracite
se double d'un cycliste ton sur ton. Un look pratique à enfiler. Pour passer
inaperçu tout en restant pointu. Un autre pullover, vert d'eau, laisse sensuellement
dessiner une ligne transparente au-dessous de la poitrine, pour un jeu de
construction exacerbant une certaine sensualité. Une robe tablier se pare
de milliers de perles de verres crayonnant une arabesque florale. Un véritable
vitrail textile. Une jupe en dentelle corail s'incruste de perles de culture
à intervalles réguliers. Une veste matelassée, à la configuration d'un soleil,
s'estampe de petites chimères médiévales. Avec un pantalon ample en néoprène
carbone. Ou en bustier sur Seng Khan. Nicolas Ghesquière affectionne l'utilisation
de patchwork de matières. Il les injecte sur des blazers architecturés,
aux épaules arrondies, mêlant néoprène, cuir, laine et tapisserie comme
sur Evie
Saunders. Un top, en denim sombre,
aux entournures bouffantes, s'incruste de pierreries associées de fils dorés.
Les derniers passages demeurent une ode à la dentelle, passementerie et
broderies. Même si les robes du final, aux apparences de méduses, demeurent
abracadabrantesques, celles-ci restructurent la silhouette comme jamais.
Architecturales, de couleur pastel, ces dernières, s'enrichissent de galons,
de froncés, de transparence, d'arceau et de nœuds surdimensionnés. Il y
a un effet "petite fille" dégotant la robe trop grande de sa maman. Ici
germe l'exception. Nicolas Ghesquière poursuit sa quête de formes novatrices
stylistiques pour encenser des silhouettes inédites. Avec pour but ultime
de célébrer la femme et son corps. Une révélation.
YG
Vuitton
Cruise
Printemps/Eté
2024
YG
YG
Loewe
Printemps/Eté 2023 par Jonathan Anderson
Sur
la suite n°1 en G major de Bach apparait la première silhouette dessinée
par Jonathan Anderson pour le Printemps/Eté 2023 de la maison Loewe. Dans
un écrin immaculé, éblouissant de lumière, se dresse, seul, en son centre,
une fleur d'anthurium géante. Vigoureuse et pleine de promesse érotique.
Cet oblong pétale vermillon, combiné d'une tige phallique crème, symbolise
nettement le sexe féminin. Cette allégorie sexuelle demeure subversive mais
pas seulement. Si on s'attèle à une lecture, très premier degré, elle pourrait
être une ode magnifiée à la beauté et la richesse de Dame Nature. Cependant,
si Jonathan Anderson opte pour cette fleur précise, on ne peut présumer
à cette naïveté latente. Mais, lorsque l'on est reconnu comme un designer,
au demeurant cérébral et intellectuel, il est nécessaire de formuler ses
gouts, ses désirs les plus intimes avec tact, élégance et raffinement. Jonathan
Anderson demeure un directeur artistique qui cogite, peut-être un peu trop,
ses collections afin de générer des pépites stylistiques inédites, recherchées
par ses fans. Passionné par certains artistes contemporains ayant un discours
et point de vu singulier sur le monde, il injecte avec une facilité déconcertante
des concepts déments, saugrenus, dans l'élaboration de ses vêtements. Une
robe bustier en velours anthracite, à la conformation de "paniers" latéraux,
ouvre le bal sur un parquet d'une blancheur lactescente. Lumineux tel la
neige d'un glacier. Il la décline en grège, mandarine ou émeraude. Ma préférée.
Apposé sur l'un des escarpins, une feuille de palme verdoyante enveloppant
cette fameuse fleur d'anthurium. La robe suivante s'inspire d'un design
de robe de vestale. Une énorme fleur d'anthurium plastifié, blanche cette
fois, fait office de bustier. On ne voit que sa tige phallique Anis tel
une virgule vivifiante. Ou un coup de pinceau véloce. La même robe, versa
ébène, se flattera d'un anthurium oversize vermillon. Sur Loli Bahia, cette
même fleur enserre son buste tel un plaid. Comme si la nature offrait ses
plus beaux atouts pour couvrir ceux qui y décèlent sa beauté. On ne peut
nier l'originalité du design des chaussures. D'anticonformistes escarpins
prennent la configuration de souliers à la "Minnie". Comme si celles-ci
étaient amplifiées à l'hélium. Sans omettre d'annoter les ballerines méduses
ahurissantes. Les escarpins se tapissent de centaines de ballons en latex
dégonflés. Un clin d'œil à la collection Automne/Hiver 2022/2023 ou les
ballons à demi-dégonflés ornaient, ici et là, une robe seconde peau ou une
lanière en cuir d'escarpin. Comme si les collections de Jonathan Andersson
communiquaient et résonnaient entre elles. Un effet d'optique crée, notamment
par le biais de jeux de divers rayures, une distorsion de la silhouette
sur une robe à l'allure de "patineuse". En laine tricotée gris souris, glacier
ou charbon, ces dernières perdent en originalité mais gagnent en praticité.
Des robes bustier, bleu céruléen, sang ou chamois, se bâtissent autour de
l'idée de pics montagneux d'où découlent des drapés ondulants. La pièce
pointue portable. L'une de mes pièces favorites s'inscrit dans la simple
idée de la reproduction du pixel informatique. Le tee-shirt se découpe,
sur les pourtours, telle une forme géométrique représentant les bordures
carrées de pixels informatiques. L'impact visuel reste dément. Le pantalon
s'estampille du même effet dans des camaïeux Camel. J'affectionne pareillement
le sweater à capuche bleu layette. Jonathan Anderson s'enivre de l'air du
temps et le duplique consciemment à merveille. Assurément l'un des looks
de la saison de l'été 2023. Quelques micro-robes florales s'enduisent d'une
couche de matière plastifiée évoquant inconsciemment une inclination de
protection. Toutefois, l'aisance ne sera pas l'effet recherché de ce look.
Un plastron incurvé, ou corset post-dorsal rétro versé, s'agglutine sur
la poitrine d'Hanna Felding telle une armure nouvelle génération. Le blouson
aviateur, taille base, en peau retournée, estompe les effets podium. Les
robes/manteaux, en cuir souple, prennent la configuration de chemises super,
super, super amples. Les manches balayent le sol avec courtoisie. Pour se
donner un style cool, on boutonne lundi avec mardi, mardi avec mercredi
et ainsi de suite. La variante en coton chiné relate un esprit plus sportif,
mettant en valeur le sac cousin et l'escarpin au bouton d'anthurium. Une
seconde longiligne chemise, en mousseline poussin, hyper légère, s'acoquine
d'un ample jogging. Streetwear à souhait. Sur le mannequin Rolf
Schrader,
l'anthurium pelliculé peut s'incarner tel un cache sein sur une nuisette
asymétrique à la tonalité torride. La variante vert pomme reste décidément
beaucoup moins affriolante. Une autre, au demeurant plus classique, ose
la doublette pour dissimuler cette poitrine que l'on n'oserait dévoiler
à tous. Le soir demeure assez structuré et découpé. Il y a des jeux de matières
entre transparences et opacités. Des nœuds oversize cassent les silhouettes.
Les couleurs peuvent être lumineuses et feutrées tel que le mauve sur Evie
Saunders
ou le poussin sur Alix
Bouthors.
Les idées fraiches et novatrices de Jonathan Anderson me subjuguent. Pas
un seul de ses défilés ne me laisse de marbre. Il est indéniable qu'il parait
comme le véritable maestro du style artistique. Il allie avec génie des
coupes novatrices aux idées complètement improbables et inattendues. Un
ovni. Loewe, sous le joug de Jonathan Anderson, se distingue comme une des
maisons diffuseuses de tendance. Etre avant-coureur demeure sa plus grande
force.
YG
Loewe
Printemps/Eté
2023
YG
YG
Miu
Miu Printemps/Eté 2023
par Miuccia Prada
Pour
le Printemps/Eté 2023, la maison Miu Miu s'est attelée à composer des silhouettes
athlétiques et dépouillées. La ligne, la ligne, la ligne. Des pièces un
tantinet minimalistes alliant tissus techniques avec confort sans effort.
Le mot phare pourrait être "Effortless". On découvre davantage de K-Way
que d'habitude. De couleur beige, ils peuvent se coupler avec de petites
minijupes ton sur ton. Un coupe-vent revêt cette même matière technique
munit d'un zip élancé argenté. Cette pièce apparait aérienne et se grime
d'une transparence confuse. L'originalité se dessinant à travers sa double
fonctionnalité qui d'un simple ceinturon la transforme en robe. Une seconde
robe/bustier acier, aux fines bretelles, utilise elle aussi ce même nylon
à l'allure sportive. Pour le vestiaire masculin, on peut opter pour une
parka en nylon ferraille aux poches oversize sur la poitrine. Commode. Quelques
combinaisons d'aviateurs se griment de gris clair ou de chamois. Facile
à enfiler. Le cuir demeure patiné, vieilli, lustré. Presque sali. On le
sent épais et rigide sur un manteau filant sans manche. Comme s'il avait
traîné dans la graisse. Un mini short, au masculin, gonfle la silhouette
par son jeu d'éminentes poches frontales. La marque Miu Miu se graphe par
de délicates étiquettes s'apposant discrètement sur le vis-à-vis d'une jupe,
sur la tranche d'un caleçon ou la ceinture d'une jupe crayon. Une première
idée forte pour ce Printemps/Eté 2023 s'incarne par cette superposition
des couches textiles. On empile. On accumule. On superpose teeshirts, sweat-shirts
et chemises, en triple épaisseur. Certaine brassières concèdent l'effet
optique d'un trio empilé alors qu'elle n'est que simple pièce. Toutefois,
la moiteur de l'été ne pourra les valider que par la finesse des étoffes
ou la légèreté sans faille de ces dernières. Le denim demeure fort présent
lors de cette présentation. Beaucoup de jeans délavés qui se chamarrent,
se bigarrent et se panachent de tonalités anthracite et Camel. Le manteau,
en denim cuivré, s'inscrit comme un futur basique. Intemporel. Ses bordures
sont exécutées via un jeu subtil de teintures plus foncées véhiculant du
relief à la tenue. En version deux pièces, il est d'une aisance imparable.
L'ourlet du pantalon se retourne et se remonte aux chevilles charriant un
esprit preppy. Un bustier droit comme un I se teinte de ce fameux tie&dye
mordoré, insufflant un rythme hypnotisant à la silhouette. Un manteau longitudinal,
en cachemire de grand-papa, fera parfaitement l'affaire pour cacher une
brassière et mini jupe tie&dye que Britney Spears aurait adoré enfiler à
la période de son tube "Baby one more time". On dissimule mais l'esprit
se la joue un tantinet dévergondé. De couleur argent, un autre manteau se
fera plus ample. Avec un logo Miu Miu 2D brodé, ton sur ton. Les minis,
énorme succès de l'été 2022, reviennent agripper la silhouette comme d'amples
poches ventrales. Clairement, elles demeurent la cible de la jeune génération
friande de ce type de pièces charnelles. Un petit ruban compressible enserre
les têtes discrètement. Ajourée d'une fugace étiquette Miu Miu. La danse
apparait comme une autre inspiration pour cette collection estivale 2023.
Les bottes dessinent des spartiates de couleurs absinthe ou bistre. Elles
font écho au modèle de la maison Prada de l'été 2020. Toutefois, ces dernières
embrassent les chevilles et peuvent saisir des tonalités fluorescentes telles
que l'orange, le rose ou le vert. La tenue, en lurex vert irisé de Julia
Nobis, la dévoile d'une manière charnelle. Tout est découvert même si ce
voile cristallin tente de dissimuler des courbes sensuelles. L'étiquette
Miu Miu restant toujours discrètement apposée. La version parme divulgue
une culotte et brassière athlétique. Des tenues affriolantes pour une poignée
de filles peu farouches. Les looks suivant amalgament des camaïeux de mousse,
tabac, vert kaki ou beige. Des pièces bannissant les saisons pour tout temps.
Les parkas se féminisent en marquant finement la taille par un jeu de liens
délicats. Une mode sportswear et juvénile assumée. Un parti pris mettant
en valeur les mensurations corporelles via des choix de matières ajustables
et ajustées. Une mode qui protège des éléments extérieurs via l'ensemble
des pièces en nylon. Une chemise minimaliste, en cuir jaune fluo froissée,
se couple d'un pantalon en cuir souris à l'aspect chiffonné. Le cuir apparait
presque tourmenté. Un "colorblock" pour un look qui se veut totalement androgyne.
D'autres versions sont proposées entremêlant vieux rose/tabac ou beige/Camel.
Des sequins argentés ou dorés viennent bordés et enveloppés des jupes opalescentes.
Un top et jupe cristalline investissent une broderie en sequins argentés
dessinant une arabesque géométrique. La jupe, tout en perles jaune fluorescentes,
s'intercale et s'additionne de pampilles tout en rondeur. Un effet kaléidoscope
dingo. Les micro-perles accolées aux sequins confèrent un effet peau de
poisson, presque petite sirène. Scintillement. Une collection alliant des
basiques adaptés au quotidien des pays industrialisés incorporant une palette
de tonalités pratiques à porter. On fusionne détails mode avec des pièces
vestimentaires fortes tels que poches oversize, mini-mini jupes, cuirs patinés,
"skindress" argentines ou robes filets perlées afin de finaliser des looks
uniques, sportifs, parfois déjantés.
YG
Miu
Miu
Printemps/Eté
2023
YG
YG
Paco
Rabanne Printemps/Eté
par Julien Dossena
Sur
un EP Techno de Yinon Yahel & Mor Avrahami, intitulé "Sweat", la présentation
Paco Rabanne pour le Printemps/Eté 2023 va carburer, détonner, crépiter.
Cette litanie répétitive et lancinante va dispenser une sacrée énergie aux
mannequins. Ca galope. Ca cavale. L'atmosphère s'emplit d'une détermination
inextinguible, d'une opiniâtreté palpable et d'une hardiesse sans faille.
La terminologie "Sweet" parait bien fade. Ce podium, édifié de rambardes,
de grilles de chantier et d'échafaudages, s'inscrit dans une évidence urbaine,
industrielle. S'il y a bien un terme qui ne définira pas, de prime abord,
cette anticonformiste présentation, ce sera bien le mot douceur. Rien n'apparait
sucré, suave, comme le serine Yinon Yahel. Mais tout s'apparente âpre et
acide. Non conventionnel. Le top français, Loli
Bahia, arpente la première cette dentelle métallique austère.
Avec de grosses bottes gothiques, gainées de chaines argentées, Miss Bahia
s'entortille d'une robe en latex violet, électrique, bordée de fines dentelles
chantilly carmin. Un look super fluide mais cocasse. Le fichu visé sur la
tête, en cuir rouge, perforé de rivets argentés, lui confie un air de babouchka
conviée à une rave berlinoise. L'esprit lingerie apparait comme le premier
trait ensorcelant de cette collection. Ce qui l'est encore plus s'incarne
dans l'utilisation du latex à la place d'une soie conventionnelle ou d'un
satin plus convenu. Une nuisette techno-gothique en quelque sorte. La suivante
s'incarne dans une tonalité améthyste des plus profondes. Avec des lès de
dentelles ton sur ton. Le fichu, cette fois, prendra une carnation ébène.
Une dentelle pistache se cramponne à un latex ébène étincelant. Un boxer,
en latex, laisse dévoiler des cuisses musclés. La dentelle exhibant une
portée délicate. Le K-Way à capuche ressemblerait quasiment à du cuir. C'est
à s'y méprendre. Julien Dossena s'amuse des contrastes et matières. Il les
renforce. Les fait décamper de leur zone de confort. Ashley
Radjarame
ressemble à un oiseau de mauvais augure avec son top en latex, enserré à
la taille, s'achevant par une jupe en micro maille de métal anthracite.
La suivante investit un souffle de costume bavarois. Le trench incarnate,
aux épaules évasées de Sora Choi, s'enorgueillit d'une fermeture aux rivets
argentés. Sur Seng Khan, le trench plastique cristallin, se pique de brèves
perles en verres dispensant un effet de gouttelettes de pluie. Une veste
en jacquard fleuri groseille embellit de son bermuda se superpose d'une
strate plastifiée cristalline. Sur Oudey
Egone,
le top en cuir se transforme en harnais de jeux pour adulte. Julien Dossena
n'hésite pas à transposer dans sa mode pour l'été 2023 des pointes et notions
tirées de l'univers sadomasochisme. Un top délicat, aux micros plissés,
probablement en soie, s'imprime d'une pléthore de fleurs à la tonalité arc-en-ciel
que Tessa Bruinsma porte avec vigueur. La périphérie de cette pièce délicate
se dessine par une réplique à l'infini de motifs pyramidaux. Le métal est
tricoté comme une maille seconde peau. Il coule sur le corps pour l'épouser
comme une seconde peau. Il peut s'anoblir d'interminables fils en perles
argentées comme sur Evie
Saunders.
Sans omettre le foulard en métal noué sur la tête. La version ébène restant
la moins criarde. Pourtant tout aussi désirable. La jupe de Marte
Mei van Haaster revêt les fameuses pampilles amalgamant
métal et plexi. En duo color. La besace en métal tressé ne prend pas une
ride. Totalement dans le coup et indémodable. Les accessoires en cuir, comme
bracelets de force, colliers de chien, bottes de motards, rangers collés
de plaques de métal à la semelle, peuvent faire appel à des inspirations
entrecroisant des univers spécifiques comme ceux des bikers, des punks,
des gothiques voire sado-maso. Le latex étant une des matières affectionnées
dans le cadre de relations dominant-dominé. Bref, Julien Dossena domine
bien son sujet et arrive complètement à sublimer cette matière sans la faire
paraitre trop sexuelle. Un compromis consensuel. L'imperméable de Giselle
Norman
demeure d'une redoutable efficacité. Érigé comme un Tie& dye en latex, et
réalisé par un procédé main maison, les tonalités adoptées font référence
à un volcan en éruption. Ma pièce favorite. La robe de Louise
Robert
offrant, elle, des tonalités de printemps étincelant. Des robes en mousseline,
anthracite ou rose poudrée, se voient appliquer de discrètes lignes perlés
sur les jambes. Une autre, en mousseline jade, surprend par le jeu de pléthoriques
perforations de rivets argentés. La jupe crinoline, aux froufrous volumineux,
en tulle crème, prend une configuration de danseuse gothique sur Akon
Changkou.
Quand la crinoline en mousseline s'allie à la finesse d'une maille métallique,
on distingue distinctement la symbiose intégrale entre délicatesse d'une
étoffe et rudesse d'un matériau. Du pur Paco Rabanne.
YG
Paco
Rabanne
Printemps/Eté
2023
YG
YG
Prada
Printemps/Eté 2023
par Miuccia Prada
Depuis
quelques saisons, la maison milanaise, sous la houlette de Miuccia Prada
et Raf Simon, navigue en eaux troubles car amalgamant deux styles radicalement
opposés. L'aliénation artistique de Miuccia Prada accolée à la rigueur drastique
de Raf Simons. Une union de cœur mais pas de style. Parfois, le cœur a ses
raisons que la raison ignore, dixit une célèbre maxime. L'idée fondamentale
étant de préparer la succession artistique le plus efficacement possible
entre ces deux protagonistes de la mode. Mais est-ce la bonne formule ?
Pour ce nouveau chapitre Printemps/Eté 2023, la maison Prada est propulsée
vers un chemin plus dépouillé, dépiauté, sans fioriture. Même si le style
reste simple, il est loin d'être simpliste. L'ère du "m'as-tu vu" demeure
définitivement révolue. C'est Tanya
Churbanova
qui arpente la première ce podium de couleur sable. Avec une combinaison
en popeline de coton gris souris, seconde peau, et un simple pardessus stoppant
au genou, elle incarne le look, au féminin, d'un col blanc se rendant à
la City. Cette combinaison sculptant la silhouette comme jamais, demeure
comme la pièce qui focalisera toute l'attention cette saison. D'un seul
tenant, elle parait complètement multitâche et la base de presque tous les
looks. Elle peut se faire bleu de travail, pyjama, look pour sortir. Les
tonalités se révèlent grégaires : beige, gris, blanc, noir. Le trench reste
d'une veine minimaliste. Avec le petit logo triangle à la base du cou. L'effet
signature Margiela. Une tunique ample en mousseline anthracite se faufile
toute en légèreté au dessus de la combinaison de la saison. Quand elle n'est
pas seulement accessoirisée d'une simple culotte ébène sur Sara
Blomqvist. Un manteau peignoir, toujours en mousseline,
se colore d'une teinte jaune souffre. Il y a presque cet effet sorti de
bain. On recouvre aussi des longilignes jupes transparentes déjà aperçues
lors du défilé Automne/Hiver 2022/2023. Il y a une épure des lignes, des
formes, des imprimés, des tissus, pour fonder une allure fondamentalement
pragmatique et fonctionnel. On insuffle distinctement du basique, du primaire
et de l'aisance corporelle comme sources de référence. Peut-être, en ces
quelques termes, la maison milanaise a perdu de son identité, de sa force,
voire de l'attrait. Car l'imaginaire Prada implique et suppose des imprimés
artistiques, des thèmes puissants (Frankenstein, la BD crée par des femmes,
les marins, l'épure japonaise, etc.). Quelques robes bustier, en soie, qu'on
enfile d'une seule traite, se prolongent de dégradés Tie&Dye sur leur périphérie.
Avec des échancrés balafrés laissant apparaitre une jambe fuselée. Celle
de couleur absinthe incarnera un choix judicieux et intemporel. Les versions
en soie mandarine, chocolat ou rouge sang, patinées, insufflent un coup
de fouet à la collection. D'autres se font minimalistes et se configurent
telle de simples serviettes de bain nouées à la vite. Celles du final s'imprègnent
de motifs de jets de bouquets floraux. Elles restituent les lettres de noblesse
à la présentation Prada. Enfin des looks boostant et faisant vibrer la prunelle
de nos yeux. Des plissés froissés "fait exprès" s'intercalent sur une jupe,
un sweater, une robe, un pull. Surement pour insuffler une note moins apprêtés.
Déjà fatigué. Le fameux détail mode. Le geste de maintenir sa veste fermée
avec une seule main fait partie du folklore. Les sandales prennent des tonalités
vitaminées pour concéder du tonus aux tenues un peu trop strictes. Orange,
Jaune Fluo, rose guimauve, vert pomme. Les sacs basiques se colorent de
mandarine, vert gazon, parme, chartreuse. Quelques looks sombres pour un
effet total Dark Baby Doll. Loli
Bahia,
Elise
Crombez et Evie
Saunders
ont récupéré ces looks en cuir ébène. Quelques fleurs colorées viennent
agripper les épaules de Sélèna
Forrest et Lineisy
Monteiro. Elles ne sont pas sans rappeler celles de la
collection Frankenstein pour l'automne/hiver 2019/2020. Sans omettre la
fameuse traine du défilé printemps/été 2022 utilisée à nouveau sur quelques
longues robes noires du final. Allouer des looks beaucoup moins mode implique
probablement une ivresse sans alcool. Voire édulcorée. Probablement, la
ligne printemps/été 2023 aura une apparence moins forte que d'autres collections
mais peut-être sera-t-elle aussi plus durable dans le temps ? Toutefois,
ce que l'on appréciait chez Prada, période post-Simons, était justement
son anticonformisme ; de ne convoyer aucune tendance ; d'avoir de la personnalité
; d'assumer un certain mauvais goût ; d'être prescriptrice et non suiveuse.
Alors, Miuccia Prada, grande prêtresse mode, dont les goûts bien prononcés
pour l'inattendu, le décalé, le désaxé, laisse malheureusement plus de liberté
d'expression à celui qu'elle considère maintenant comme son alter ego. Une
présentation qui atteste d'une présence plus prégnante celle de Raf Simons.
Moins de Miuccia Prada en vue. Il fallait s'y attendre puisque Raf Simons
est sensé devenir, à terme, le capitaine de ce prestigieux navire. Espérons
qu'il le mène à bon port.
YG
Prada
Printemps/Eté
2023
YG
YG
Saint-Laurent
Printemps/Eté 2023
par Anthony Vacarello
Face
à la Tour Eiffel, un monumental sigle YSL en métal doré satiné, dominant
une fontaine sphérique, projette une impression de toute puissance érectile.
Au sein du jardin du Trocadéro, ce logo impressionnant accroît l'excitation
de ceux qui patientent pour découvrir l'inédite collection Saint-Laurent
pour le Printemps/Eté 2023. Ce bassin d'un calme absolu dégage une sensation
d'apaisement et de tranquillité. De quiétude. Les dallages humidifiés, inspirés
de mansardes cossues, réfléchissent la splendeur du quartier, particulièrement
celui du palais de Chaillot face à une Tour Eiffel coruscante. Une féérie
visuelle. Une sonate au piano, jouée par SebastiAn, un tantinet mélancolique,
chuinte sur cette monumentale esplanade. L'escalier solennel, dévalant vers
le podium, laisse apparaitre une première silhouette dont le trench filiforme,
en cuir chocolat, diffuse une allure très altière mais complètement étrécie.
Voire "maigrissime". Il glisse sur le sol tel un coup de plumeau. Voire
l'époussette. Lunette noire, la femme Saint-Laurent se dissimule, se camoufle.
On la distingue de loin, mais, derechef, il semblerait qu'elle ne souhaite
voir personne. Attitude arrogante. Hypothétiquement, désire-t-elle rechercher
une certaine quiétude ou guetter furtivement une éventuelle proie ? Peu
importe, on la flaire distante. Il y a presque une dramaturgie ambiante
latente sur le podium, du en partie à cette sonate monotone et régulière.
La femme Saint-Laurent demeure perchée sur des talons aiguilles improbables.
De ceux qui exercent une démarche irréelle, même dérangeante. Presque malaisante
pour celle qui les adoptera. Une torture pédestre. Les robes en micro maille
se fondent sur la peau. Ces dernières englobent en totalité ces corps étroits.
Jusqu'au cou avec des cols cheminés. Une procession de silhouettes d'une
finesse extrême, allant presque à contre courant de la tendance actuelle,
annexant les fameuses tailles XXL. Chez Saint-Laurent les grandes tailles
n'ont malheureusement pas leur place. Elles sont bannies. Un parti pris
qui va à l'encontre de l'air du temps. Mais pourquoi pas. On ne peut pas
plaire à tout le monde. Les filles cheminent de manières saccadées permettant
de contempler plus longuement les vêtements élitistes d'Anthony Vacarello.
Le boléro/perfecto de tonalité ébène, enfilé par Alix
Bouthors,
se marie excellemment bien avec sa "skin dress" élancée, faisant apparaitre
en transparence les formes toniques de cette ravissante française. Une simple
"skin-dress", comme l'avait dénommé Karl Lagerfeld au milieu des années
90, qui se colore d'un vert sapin pour Freja
Beha ; d'un charbon sur Loli
Bahia
; de rouille sur Rianne
Van Rompaey
ou de chair sur Miriam
Sanchez.
Des robes qui se font presque bas de contention. Tellement elles compressent.
Serrent. Compriment. Néanmoins, elles relèvent et révèlent la collection
de bijoux dorés. Une prime aux manchettes et boucles d'oreilles géantes.
Un certain raffinement poussé à l'extrême. Quand la capuche s'ajoute, on
ressasse la fameuse tenue de Gala de la chanteuse Grace Jones dans la saga
007 et plus précisément dans le film "Dangereusement Votre". On l'adopte
dans des tonalités de safran, d'aubergine ou d'aniline. Les épaules s'extrapolent
parfois dans des largeurs XL et restent toujours tombantes. Les couleurs
du vestiaire demeurent choisies avec subtilité et subsistent perpétuellement
dans des touches monochromes. On peut les accorder en jouant sur un camaïeu
: de l'ocre avec du miel ; ou absinthe avec un olive, par exemple. Beaucoup
de tonalités abyssales. Les pantalons se font cigarette. Presque fuseau.
Enormément d'interminables imperméables en cuir souple de couleurs cardinal,
brique, caramel, alezan, anthracite. Fourmillantes sont les robes de soirée.
Elles s'allient volontiers avec des pièces préférablement usitées au quotidien
: perfecto, trench, blazer, boléro. Des drapées subtiles s'amoncellent telles
des vaguelettes sur le buste et se prolongent par d'émouvantes capuches.
Une chasuble, col en V, laisse découvrir un nombril sans complexe. Une interminable
robe en lamé se compose d'un imprimé léopard, dans une veine bling-bing.
L'unique imprimé de la collection. Anthony Vacarello opte pour des lignes
droites, rectilignes, sobres. Parfois un peu trop rigides. Toutefois, subsiste,
de-ci de-là, une certaine autonomie de mouvement. Un renoncement maitrisé.
Avec quelques cabochons surdimensionnés suspendus gracieusement aux lobes.
That's all. Rien d'autre. Un minimalisme savamment contrôlé. Une mode d'impact.
Une collection dont les proportions pourraient être celles d'un hiver impitoyable,
pactisée de matières textiles estivales. Délectable sensation. Une collection
assurément mystérieuse, sensuellement classique et totalement enivrante.
Anthony Vacarello propose un vestiaire que les femmes pourront adorer. Mais
aussi détester si les coupes proposées demeurent d'une apparente finesse.
Chez Saint-Laurent, la femme sera énigmatique et raffinée. Complètement
Newtonienne. Sûrement l'ultime terme pour la qualifier pour cet été 2023.
YG
Saint-Laurent
Printemps/Eté
2023
YG
YG
YG
YG
Défilés
Automne/Hiver 2022/2023
Par Yann Gabin
pour PlaneteMode.com
Balenciaga
Automne/Hiver 2022/2023
par Demna Gvasalia
Balenciaga
360° Show Winter 22 Collection. Avant de débuter sa présentation Automne/Hiver
2022/2023, la voix de Demna Gvasalia, grave et sérieuse, s'exprime sur le
début de guerre en Ukraine. En ukrainien, il dénonce cette ineptie humaine.
Lui, qui a connu les ravages de la guerre lors de son enfance, ne pouvait
rester insensible face aux exactions russes, localisées à moins de 2000
kilomètres de Paris. Optimiste, il prie pour tous les peuples oppressés
et, particulièrement ceux dont les vies demeurent déjà brisés à la frontière
de l'Europe. Un énorme cercle couvert de neige fait office de set design
pour ce défilé Balenciaga. Telle une arène, les invités se discernent furtivement
derrière une vitre à 360°. Comme s'ils étaient derrière la paroi d'un zoo.
Voyeurisme. Voir sans être vu. Une allégorie de l'écran. Le carton d'invitation,
originale une fois de plus, s'incarne dans un I-Phone brisé et gravé à la
date de présentation. Un cirque contemporain ou l'on patiente avec délectation
pour observer bien confortablement le spectacle de la vie. Un décor glacial
et frileux ne laissant rien présager de bon. Quelques flocons de neige dégringolent
avec parcimonie. Un souffle léger les balance doucement jusqu'au sol gelé
qui ne sera certainement pas commode à fouler. Ce paysage mortifère dégage
un sentiment de catastrophe imminente. La luminosité baisse. Un brouillard
aérien se propage. La première silhouette s'envole dans un vent offensif.
Robe noire chauve-souris "sauve qui peut", lunette sombre "œil de mouche"
et sac poubelle en cuir. C'est sombre. Non pas la mode de Demna Gvasalia
mais le Mood. On s'échappe, on fuit, on se réfugie. On devient réfugié.
Le jeune garçon enfile un bustier/pantalon mazout. Peut-être n'a-t-il pas
eu le temps de trouver autre chose avant de décamper. Les silhouettes demeurent
sur l'ensemble du show d'une profonde noirceur. Ces dernières sont maigrichonnes
et décharnées. Voire effrayantes. Mais la guerre est un monstre. La combinaison
en cuir verni se fait deuxième peau. Si l'on est un temps soit peu mince,
l'allure offre une vision frôlant l'anorexie. Agrémentée de bottes talons
aiguilles acuminées pour cheminer dans la neige, l'image en est presque
burlesque. La version rouge sang ne promulgue pas un désir de bien être.
Le pompon s'incarnant dans la version momie/scotch dont le duo "colorielle"
me remémore celui du ticket de métro des années 80. Siglé Balenciaga bien
entendu. Les looks anthracite se suivent et se ressemblent vaguement. Souvent
avec un sac poubelle à la main. Les garçons enfilent des bottes à talons
aiguilles, dont la configuration s'évase aux genoux tel un château d'eau.
Comment dire ? Si l'esprit demeure ouvert, on notera un certain avant-gardisme.
Si ce dernier l'est beaucoup moins, on rétorquera que l'on ne saisit rien
à la mode. Que l'on parait dépassé, ringard, suranné. Bref, la rue en décidera.
Pour débriefer : les hommes sont des femmes qui sont des hommes qui sont
des femmes. Les vêtements appartiennent à tous. La veste en cuir demeure
toujours over size. Un grand classique de la maison. Totalement surdimensionnée.
C'est l'abstraction du corps. Ses proportions demeurent effacées pour faire
place à une conformation éthérée. Toutefois, quelques looks, à l'allure
classique, redonnent espoir. Col roulé cachemire, jupe tournoyante, robe
seconde peau en laine mettent en valeur le nouveau sac de la marque : le
Hourglass. Bella
Hadid
traverse le champ de vision avec une robe enveloppante avec effet trompe
l'œil. La surimpression d'une robe dentelle, sans manches, sur un tissu
élasthanne neigeux en fera l'un des hits auprès de la presse. Une seconde
robe réitère les imprimés fleuris, aux tonalités mandarine, orange et tournesol,
que l'on a pu remarquer lors des premières collections de Demna Gvasalia
pour Balenciaga. Les bottes seconde-peau en reprennent le motif. Total look.
Finalement un peu d'allégresse dans ce monde de barbare. Le manteau ample,
en fausse fourrure neige, véhicule une allure de dame fortunée. Les nantis
peuvent aussi fuir la guerre quand ils se sentent persécutés. La danse Slave
pour piano N°2 joué par Michel Beroff et Philippe Collard se troque d'une
rave music entêtante joué par le groupe BFRND. Ca cogne. Quelques pièces
pratiques défilent sur le podium et seront certainement des incontournables
chez les jeunes milléniales comme le Hoodie rose layette, le Sweat ébène
marqué d'une flèche et d'un 360°, le sweater à capuche poinçonné d'un XXXL
ou le pull serviette de bain en cachemire. Le show s'achève dans une tempête
chaotique avec deux looks rendant hommage au courage des ukrainiens. Un
jogging à la configuration d'une tenue de surf de ski totalement canari.
Puis, une robe bleue, identique au drapeau du pays, se couple d'une longiligne
traine qui par un vent fonceur et frondeur vole telle une furie. Si le milieu
de la mode apparait totalement déconnecté et souvent hors du contexte de
la réalité, Demna Gvasalia, avec cette présentation, a axé son propos vers
un réalisme véridique. On a le droit d'affirmer ses opinions et les scander
et je l'en félicite. Mais, dans une société déjà anxiogène, violente, désobéissante,
ne recherche t-on pas dans les présentations des Fashion Weeks à s'évader,
recouvrer un peu d'espoir et de magie. A rêver tout simplement à un monde
meilleur ?
YG
Balenciaga
Automne/Hiver
2022/2023
YG
YG
Bottega
Veneta Automne/Hiver 2022/2023
par Mathieu Blazy
Pour
sa première collection pour la maison Bottega Veneta, Mathieu Blazy a exécuté,
à mon humble avis, un carton plein. Tout le vestiaire demeure désirable
à souhait et réfléchi intelligemment. Il mêle néoclassicisme, interpelant
celui des années 80, avec une prise de position stylistique qui cadre exactement
avec les envies à venir (Simplicité et technicité des matières). On ne perçoit
aucun décalage superficiel ou de déphasage avec l'identité maison, toujours
d'avant-garde. J'ai simplement tout adoré chez Bottega Veneta. Le lieu du
show peut osciller entre une usine réhabilitée ou un parking réaménagé.
Les néons alignés telle une escadrille diffusent une lumière froide qui
se révèle en adéquation totale pour la mise en valeur de chaque pièce vestimentaire.
Un podium central, à hauteur d'invités, s'achève par un second podium circulaire
à 360 degrés. Une moquette, vert amande, douce au regard et aux pieds de
ceux qui la fouleront. La musique : "This is your life" d'Ishi Yu, couplé
à la Bande Originale du film d'anticipation Matrix, me projette vers un
sentiment d'urgence. Il y a de l'engagement, du combat. Il ne faut rien
lâcher. Le premier look semble d'une simplicité déconcertante : Marcel blanc
(que l'on apercevra aussi en ouverture chez Prada, rehaussé du logo triangulaire
iconique maison), jean classique ample, escarpin noir. Mais pas n'importe
quel jean. Un cuir imprimé Denim. Un résultat ultra réaliste. A se méprendre.
Un look mettant en valeur une certaine attitude pour épauler au mieux le
nouveau sac maison. Une simple et longiligne lanière tressée soutenant le
précieux sac que l'on pourra "trainer" comme un animal de compagnie. C'est
l'attitude Bottega Veneta de la saison. Le second look, masculin, s'enorgueillit
d'une simple chemise en popeline blanche. Même attitude pour le port du
sac. Juste à l'arrière de l'épaule. Il en sera de même pour tous les mêmes
sacs. Le trench, en cuir neigeux, reste totalement entrouvert par l'intermédiaire
de pinces clipsées, insérées au niveau de la taille. Ingénieux. Idem pour
le trench masculin en cuir Ébène. Une robe en cuir, sans manches, agrémentée
de plumetis de cuir aux épaules, ouverte sur la poitrine et dézippée à l'entrejambe,
permet d'auréoler des cuissardes tressées à se pâmer. La version combi sans
manches, lie de vin, est à tomber. Les passages alternent looks féminins
puis masculins. La mode masculine persiste dans une veine primaire mais
indémodable. Mathieu Blazy propose de belles matières, toujours luxueuses,
embellies de couleurs élémentaires permettant d'engendrer des pièces pour
toujours : Complets larges (bleu marine, anthracite, gris ou citron, à configuration
chevron) ; Tennis en cuir tressé ; Sacs "Pouf" ; Manteaux en laine (gris
souris, beige) ; Cabans courts ou longs (bleu marine, laiteux ou noir) ;
Boots tressées ; Pulls Patchwork (Tie&Dye blanc ou marron) ; Marcels ; Pantalons
en cuir amples (chocolat, charbon, tabac, violet, vermillon ou châtaigne)
; Pulls en laine chinée (vermillon/turquoise, citron/anthracite) ; Surchemise
en cuir châtaigne ; Tee-shirt en cuir opalescent ; Chemise à rayures tennis
; Trench en gros cuir (ébène) ; Bottes de pêcheurs en cuir natté ; L'importance
est apportée aux deux sexes avec une égalité sans faille. Chez la femme,
il y a une envie de véhiculer aisance, tout en optimisant cette touche d'extravagance
et d'excentricité. Aussi bien à travers le design que le choix singulier
des tissus. Certains looks, classiques, sont clairement réservés au domaine
commercial. Smoking, manteau cintré, robe sans manches bleue marine, complet
en cuir chocolat. Toutefois, si on fait fi d'un certain minimaliste assumé,
on est ravi d'observer la courbure dorsale et convexe des cabans. Presque
à la Cristobal Balenciaga. D'examiner avec curiosité des escarpins en fourrure
flashy mandarine. D'étudier un caban en cuir rigide de couleur vermillon.
De contempler les jupes évasées en cuir, embellies de jupons en fines lanières,
ton sur ton (parme, citron, blanc cassé). De considérer trois robes dont
les patchworks contemporains se composent d'une ingénieuse alliance entre
lignes, pois, jets et projections peinturlurées. D'être abasourdi par des
carrures imitant l'arceau d'un sac. D'être surpris par des jupes et mini
jupes en cuir tressé. D'être ahuri par les robes/manteaux proéminentes en
fourrure synthétique. Sans omettre ce manteau incroyable s'incrustant de
clous dorés. Les robes du final, en sequins, sont redoutables. Celle de
couleur vert fluo me fait plonger dans un cocktail de fruits sur vitaminés.
Vittoria
Ceretti
demeure divine dans sa robe irisée ou quelques découpes laissent apparaitre
des contours de fruits. Il me semble des citrons. Avec deux broches fleuries
dorées s'agrippant sur les sequins nacrés. Quant Anok
Yai l'escorte, c'est avec une robe similaire mais de couleur
citron. Les fameux citrons. Apothéose. On fond sur les bottes en cuir totalement
Gold. Une autre paire de cuissardes émeraude pouvant aussi faire l'affaire.
Avanti Nagrath ferme la marche, comme elle l'a ouverte. Décidée à se battre
jusqu'à la fin du podium. Avec sa nuisette en dentelle saumon, toujours
brodée de sequins ton sur ton, elle investit toute son audace dans ce fugace
bustier qui coïncide complètement à un haut de maillot de bain. Avec des
cuissardes en satin poussin, elle ferme la marche, triomphante. En toute
sincérité, les astres étaient alignés pour générer un des défilés les plus
applaudis de cette saison Automne/Hiver 2022/2023. Un grand cru.
YG
Bottega
Venetta
Automne/Hiver
2022/2023
YG
YG
Chanel
Automne/Hiver 2022/2023
par Virginie Viard
Une
rivière de tweed recouvre entièrement le set-design de la présentation Chanel
Automne/Hiver 2022/2023. Murs, poufs, podium, invitations, et même les immenses
lettres Chanel accrochées sur le fronton du show, se parent d'un patchwork
étincelant de ce célèbre tissu Ecossais. Une matière, à la base, rêche et
austère qui se transforme, ici, en cocon de délicatesse pour l'ensemble
des invités. Le tweed s'installe promptement et sera, par conséquent, le
thème capital de la maison Chanel. Un indétrônable. Un code identitaire
incontournable. Que serait la maison Chanel sans ce tissu fétiche. Gabrielle
Chanel adorait le manier pour ses tailleurs légendaires. Karl Lagerfeld
en faisait autant. Il le poussait dans ses retranchements et avait eu l'audace
de le réinterpréter pour l'ensemble de la garde-robe Chanel : de la robe
crinoline aux maillots de bain, du fichu sur la tête aux guêtres de certaines
bottes, des sacs 2.55 aux casquettes. Tout en l'upgradant dans son rendu
final : effiloché, abimé, troué, peinturluré, l'amalgamant à d'autres fibres
naturelles ou précieuses. Un lainage multi-usage et définitivement indémodable.
Virginie Viard va donc miser sur le tweed. Si elle l'alloue dans des tonalités
de framboise, mure, cerise, châtaigne, marron ou charbon, elle souhaite
le célébrer au travers de silhouettes traditionnelles. Pas de fioritures.
Pas de fanfreluches. Pas de découpes tapageuses. Pas de formes chimériques.
Virginie Viard encre sa mode dans une promesse de bienveillance afin de
se sentir en totale adéquation avec le vêtement. L'idée étant qu'il soit
commode, aisé à porter, tout en entretenant cet effet indémodable. Les coupes
demeurent impeccables et tombent parfaitement. L'idée de réinterprétation
des basiques est perceptible, tout en restant jumelés au gout du jour. Parfois,
cela ne tient qu'à un fil. Les collants ou chaussettes élancées, en laine
chinée, aux stries hachurées, apportent cette touche inattendue et décalée
à chaque look. Un tantinet "pêche et tradition". C'est encore Vivienne
Rohner qui apparait la première sur le podium. Son large
manteau, au camaïeu de framboise et fraise, se pigmente de micros pois turquoise,
vermillon, anthracite et lactescent. Des détails qui font toute la richesse
de cette pièce. On lui ajoute des effets de matières pour le rendre ensorcelant.
Quant à la veste étriquée rose bonbon, col Mao, elle se dépareille par une
oblongue jupe, au-dessous des genoux, dont le design allie un tartan framboise
et kaki. Cela matche. Mica
Arganaraz
se voit affubler d'une simple redingote au tartan turquoise et col Mao.
Son look s'achève par de longues bottes de pêcheurs. Audacieux et intrépide.
Une seconde veste, de configuration classique, se revêt de fourrure polaire
caramel, tout en se galonnant de tweed Grenat. Impeccable sur Mona
Tougaard. Sans omettre les bottes classiques de jardinage,
en caoutchouc beige, siglées du double C. Un trench rectiligne, en cuir
bistre, s'échoue juste à hauteur de bottes. La pièce classique par excellence.
La chemise et pantalon cigarette, en cuir Tabac, sont à se pâmer. On les
marie avec une veste pied-de-poule dont le sac bandoulière s'accordera ton
sur ton. Very Scottish. Quant à Vittoria
Ceretti, elle se la joue presque James Bond Girl
avec une robe sans manches, en cuir souple seconde peau anthracite, agrémentée
d'une double chaine dorée enserrant sa taille de gazelle. Les gilets ou
chandails, cinq boutons, s'empourprent de tonalités joyeuses : moutarde,
cuivre, fuchsia ; se brodent de sequins et de perles. D'autres, se parent
de rayures bayadères ou d'arabesques fleuries. L'éventail est large. Le
pull en cachemire de Giselle
Norman s'agrafe de nombreuses broches camélias, aux accents
de fruits rouges. Succulent. Le tweed s'accomplit à travers des configurations
en forme de chevron, tartan ou carreaux. Parfois, les trois à la fois. Virginie
Viard le décline surtout dans une palette de tonalité oscillant entre le
Ying & Yang. Deux couleurs fondamentales. On s'amuse des effets de matières
avec les irisés, les mats, les brillants. Des jeux d'optiques apparaissent
avec les rayures, le sur-tissage ou les tricotages compliqués. Même si,
parfois, visuellement certains looks paraissent un peu chargés, voire pesant.
Cela vaut notamment pour deux looks surannés. Celui de Fran
Summers avec sa robe bustier en tweed moucheté et celui
d'Emily Miller avec son manteau un peu trop évasé. Toutefois, en dissociant
certaines pièces, on peut commodément s'orienter vers des silhouettes allégées
et plus fraiches. Les chaines dorées s'entassent autour du buste. Les fétiches
de Mademoiselle s'intercalent régulièrement autour d'une hanche, au détour
d'une épaule ou d'un cou : trèfles à quatre feuilles, cœur, aigle, cabochons.
Les paillettes argentées s'invitent sur un fourreau à se damner dont Amanda
Sanchez, mannequin cabine, le sublime à merveille. Une certaine sobriété
demeura pour les robes du final qui se parent de tissus précieux comme la
dentelle, le crêpe de soie, le tweed léger et le satin matelassé. Chanel
poursuit son écriture stylistique vers une allure plutôt conventionnelle.
Sans écarts. L'originalité ne sera pas le maitre mot. Toutefois, l'histoire
se concrétise vers une affaire de style plutôt que de mode. Avec une manufacture
qui excelle vers le haut de gamme.
YG
Chanel
Automne/Hiver
2022/2023
YG
YG
Dior
Automne/Hiver
2022/2023
par Maria Grazia Chiuri
Maria
Grazia Chiuri a innové techniquement lors de l'ouverture du show Dior Automne/Hiver
2022/2023, en proposant une combinaison confectionnée à partir d'un réseau
de leds. Dans l'obscurité complète, cet entrelacement lumineux mute en une
illumination phosphorescente telle des lucioles à la tombée de la nuit.
Maria Grazia Chiuri use rarement d'effets technologiques au sein de ses
créations stylistiques. Elle demeure assez traditionaliste, cherchant plutôt
à mettre en valeur des savoir-faire oubliés, voire égarés. C'est en cela
que l'ouverture du show Dior reste surprenante. Notons aussi l'exceptionnel.
Il est rare qu'un défilé débute dans l'obscurité complète et totale. C'est
plutôt la situation inverse ou les lumières habillent les vêtements de mille
feux. Alors, quand la silhouette de Sofia
Steinberg,
égérie maison, déambule comme un halo de lumière sur le podium, ce robot
stylisé ébahi les premiers rangs. Une fois cet effet passé, la salle révèle
une armada de portraits féminins des siècles passés, réinterprétés de manière
contemporaine. C'est-à-dire peint à moitié et contenant des failles picturales.
Notamment, avec ce double regard troublant conçu comme une erreur de reprographie.
Sur un mur lie de vin, chaque portrait laisse apparaitre une bande incolore
sur la partie basse du tableau. Comme si ces derniers n'avaient pu être
achevés. Une réflexion sur l'art pictural, sa réalisation et sa reproduction.
Mais, revenons à la collection. La veste iconique maison, la veste Bar,
s'agrippe de protubérances ou de renforts sur le buste et poches. Gonflant
la silhouette. Les gants longilignes prennent des inspirations motard avec
leurs protections protéiformes au-dessus des mains et leurs attaches velcro
aux coudes. Les couleurs demeurent flashy avec du vert pomme, canari ou
vermillon. Les surprotections se callent au détour d'épaules, sur le pourtour
de la taille ou l'arrière du dos. Rebrodé de la petite abeille Dior. Comme
les systèmes traditionnels de protection usités lors de sports de contact
tel que le hockey, le motocross ou le soccer américain. Un gilet, sans manches,
gonflé à l'hélium, recouvre la forme d'un gilet de sauvetage marin. Le cuir
de motard se confectionne de lès tricolores dont le jaune citron en jette
plein la vue. Un tailleur pantalon, en laine chiné gris souris, recouvre
une configuration d'une tenue de fitness. Notamment avec ses quelques stries
arpentant l'ensemble du look. Un Marcel pétrole, pièce incontournable du
vestiaire féminin cet hiver, et notamment vu chez Prada et Bottega Veneta,
se calligraphie de la maxime "The Next Era". L'ère prochaine serait-elle
en train de se dessiner sous nos yeux ? Certainement. Des looks plus sobres
défilent avec un tailleur Bar et pantalon ébène. Parfois, la longue jupe
plissée peut prendre un tournant asymétrique. La version mini jupe plissé
fonctionne aussi. C'est dans le détail que nait la tendance. Le trench de
Louise
Robert,
à la proportion de robe, s'incruste d'un corset à la taille, se fermant
par un jeu de lacets croisés. Un autre manteau, en lainage anthracite, marque
clairement la taille avec son ample ceinture corset, à l'allure grillagée.
Totalement dans le Mood d'Azzedine Alaia. Les coiffures demeurent sages
et s'édifient par une délicate natte se nouant sur le pourtour de la tête.
Agrémentée de diadèmes en perle, de serre-tête en velours ou de colliers
diamant. Des tartans bleu marine se marient avec une cotonnade beige via
une veste, une canadienne ou une parka. Avec des bottes en cuir rustique.
Le Vichy Yin&Yang s'intercale en diverses dimensions sur une jupe froncée
asymétrique ou un simple veston. Le classique Tote Bag demeure toujours
présent sur le podium. Un pull grège reprend l'aspect exact des poils de
la race de chien Komondor. Dreadlocks en vois-tu, en voila. Des borderies
florales, ton su ton, s'incrustent sur une veste zippé, un trench deux boutons
ou une longue jupe en coton. Discrétion précieuse. Quelques looks en toile
Denim pour la clientèle plus active. Enormément de couleurs sombres pour
les robes de bals et de soirées. Elles s'embellissent d'exquises broderies
perlées. Les dentelles et tulles transparents restent néanmoins agencés
avec convenance et décence. On dévoile sans exhiber. Le chic parisien avant
tout. Des broderies à la configuration d'arabesques, digne de la couture,
ornent gilets, tops et même la totalité d'une robe mordorée, dont les volumes
se font panier. Quelques imprimés à l'aspect de feuilles mornes seront totalement
de saison. L'apothéose du show s'achève par d'interminables robes plissées
et évasées, en mousseline aériennes, de couleurs moutarde, rubis, émeraude,
charbon et neige. Un brin virginal pour les trois derniers passages. Maria
Grazia Chiuri a axé son travail sur le prestance et la tenue du corps. Beaucoup
de corsets, de ceintures corsetées, de baleines qui s'intègrent aux vestes
Bar et robes en mousseline. La posture demeure le point primordial et essentiel
de cette collection. La femme, cet Automne/Hiver 2022/2023 sera libre, droite
mais maintenue.
YG
Dior
Automne/Hiver
2022/2023
YG
YG
Gucci
Automne/Hiver
2022/2023
par Alessandro Michèle
Alessandro
Michèle a su toujours faire du melting-pot stylistique un de ses atouts
majeurs. Une de ses forces. Une personne, un look. Pas besoin d'être tous
similaires. On prône l'individualité. On la revendique. Gucci incarne cette
diversité qui s'étend de la plus classique à la plus excentrique. Une fois
de plus pour l'Automne/Hiver 2022/2023, Alessandro Michèle mélange les looks
extrêmes avec une facilité déconcertante. Une dextérité sans faille. Un
fil décousu entre chaque look mais qui fonctionne incontestablement. Alessandro
Michèle adore titiller la notion des genres et cela depuis son premier défilé.
Cette présentation ne dérogera pas à la règle. Le premier passage s'incarne
par un costume cintré, deux pièces, ajusté à la perfection. En laine vierge,
bleu marine, boutonnage doré, il incarne le style que l'on pourrait imaginer
d'un milanais chic. Toutefois, le second look casse cette idée et demeure
radical. Un lourd manteau, en fausse fourrure, dorée s'enfile sur un body
lingerie, un tantinet coquin, cousu de lés en dentelles transparentes et
divergentes, s'achevant par des bottes bleues céruléen, aux trois bandes
latérales blanches. On valide immédiatement ce cobranding avec la maison
Adidas. Le pantalon vert hooker, couleur iconique maison, allie discrètement,
ton sur ton, les logos Gucci et Adidas. Des micros mors ambrés s'apposent
juste au dessous des poches. Les trois bandes s'intégrant sur la longueur
du pantalon. La veste anthracite se bâtit aux épaules par une proportion
bouffante. Un smoking se pare d'un pourpre hypnotisant. Une cagoule, au
design Waterpolo, se grime toujours des trois bandes blanches Adidas sur
le crâne telle une crête. Avec le trèfle brodé sur chacune des deux oreilles
(fameux logo créé en 1971). Une veste tartan, sans col, s'incruste de clou
argenté, couplé d'un collier clouté. Les baskets bowling reprennent l'identité
Adidas. Un perfecto lactescent se pique de nombreux clous, pouvant être
inspiré d'une tenue de scène de Mickael Jackson. Le pantalon en cuir chocolat
demeure d'une souplesse sans nom. L'envie de s'y glisser instantanément
me submerge. Un complet en velours côtelé bleu outremer se rehausse sur
la poitrine d'un trèfle surligné de Gucci. La même version en viscose de
soie apporte une certaine légèreté, avec le sigle G, ton sur ton, reproduit
à l'infini. Quant ce complet glisse jusqu'à la configuration d'un jogging
stylé, il redonne des lettres de noblesse au streetwear. Cette fameuse démarche
sportive, vecteur d'un certain bien être. Alessandro Michèle aime à user
d'une palette de couleurs dignes d'un automne féerique : châtaigne, vert
de gris, lichen, chocolat, mousse, neige. Un longiligne manteau en astrakan
carbone réchauffe une silhouette stricte. Avec le détail mode : la paire
de gants en cuir vert émeraude damasquiné toujours des trois bandes Adidas.
Un cobranding qui, en terme commercial, dopera surement les ventes maison.
Même si Gucci n'en a pas vraiment besoin. Elle demeure une maison iconique
auprès de nombreuses générations et l'associer à un label sportif lui permet
de concéder une image de "coolitude streetwear". Et, d'attirer l'œil d'une
clientèle plus jeune. Le sac classique Bambou, en crocodile anthracite,
s'appose sur des looks sportswear à la perfection. Alessandro Michèle perdure
dans une présentation désordonnée : une combinaison aviateur en cuir bleu
ciel côtoie un jogging en laine tricoté ; un smoking en velours anthracite
brodé de bouquets floraux en fil d'or jouxte une robe tee-shirt longiligne,
col en V, de couleur carmin, agrémentée de mitaines de boxe poussin. Un
trench argenté, aux manches courtes, s'évase jusqu'aux genoux telle une
protection contre les éruptions volcaniques. Un manteau, classique, s'imprime
de motifs de têtes chevalines. Une vibration à la Hermès. On demeure surpris
à chaque passage. Des imprimés s'inspirent totalement de tissus africains,
les fameux imprimés Wax. Le trèfle Adidas s'agrandit à la puissance dix
et se couple au logo GG. Il peut prendre des tonalités sixties allant de
la moutarde au bleu roi. Des accessoires, tamponnés Adidas, feront la joie
des générations Z et Milléniales : le béret outremer, le top de fitness
asymétrique, la casquette recouverte de la toile Gucci, les mitaines en
cuir, le cabas oversize, les solaires aux verres pamplemousse ou le bustier/corset
forme en V. Une collection qui se veut joyeuse par ses couleurs éclatantes
et chamarrées, par un melting-pot d'imprimés ethniques originaux (comme
les tissus tartans, wax ou vichy) et quelques patronages stylistiques aux
proportions complètement excentriques. La collaboration avec la maison Adidas
est une réussite. Tout simplement parce que les pièces se couplent absolument
avec le vestiaire Gucci. Il n'y a aucune distorsion stylistique entre les
deux maisons mais une osmose absolue.
Gucci
Automne/Hiver
2022/2023
YG
YG
Louis
Vuitton Automne/Hiver 2022/2023
par Nicolas Ghesquière
Nicolas
Ghesquière a délaissé son lieu de prédilection, le musée du Louvre, pour
dévoiler sa nouvelle collection prêt-à-porter Louis Vuitton Automne/Hiver
2022/2023. Sacrilège. Que nenni. Parfois, il apparait préférable de zapper
un lieu pour éviter l'installation de toute routine. Même s'il parait prétentieux
d'annoter que l'on pourrait se passer d'un lieu unique tel que le Louvre.
Mais, le milieu de la mode aime être surpris. Il faut lui titiller les axones.
Lui bringuebaler l'esprit. Le faire voyager vers d'autres contrées négligées
de notre chère capitale. Alors quel autre lieu pourrait mériter tout cette
agglomération de modeux ? Un autre musée parisien assurément. Un peu moins
notoire, moins prestigieux que le Louvre et son histoire, mais au demeurant
tout aussi féerique : le musée d'Orsay. Cette ancienne gare, à la halle
majestueuse, resplendit de lumière de par son impressionnante verrière.
Ce puit étincelant tamise l'éclairage avec bienveillance afin de magnifier
chaque œuvre exposée. Avec son dédale de salles ouvertes, de couloirs, de
paliers, d'escaliers, le parcours des mannequins en sera plus hardi, déterminé,
libre et ouvert. Un cheminement à travers des siècles de peintures et sculptures.
C'est un lieu commun mais Nicolas Ghesquière affectionne les Arts plastiques.
Inlassablement, à travers ses collections, il aime mêler et confronter ses
créations vestimentaires aux œuvres des plus grands, parfois, datant de
plusieurs millénaires. Une collision artistique. Un anachronisme garanti.
Alors, quand le départ est lancé, ça clash de suite. L'actrice et mannequin
Hoyeon
Jung, star de la série coréenne "Squid Game", foule la
première le marbre blanc du musée d'Orsay. Blouson en cuir chocolat, chemise
en soie écru, cravate florale jaune, pantalon de marin gris souris, hachuré
de segments ébène. Décontracté. Un soupçon Boyish Preppy comme aime à définir
les rédactrices de mode. Le pantalon évasé fait son come-back dans des tonalités
naturelles : en laine beige, en velours côtelé Camel, en jacquard doré.
D'autres se parent d'arabesques digne des plus beaux papiers peints psychédéliques.
On peut noter le retour fracassant de la cravate en soie à papa dont les
motifs se font floraux. Un accessoire tombé en désuétude mais encore porté
par les salariés du secteur tertiaire. Il s'allie avec un foulard noué.
C'est en cela qu'est la grande nouveauté. Nicolas Ghesquière perpétue cette
recherche de nouvelles formes corporelles. Même si celles-ci ne se prêtent
guère au quotidien. Rebrodée de fils d'or, une robe se déploie en forme
de corolle pour laisser tomber deux traines transversales. Telles des écharpes.
Une néo robe à paniers. Comme au XVIIIème siècle. Une pièce inventive parfaite
pour faire la Une des magazines. Mais, les tops se couronnant par de longues
écharpes seront rares, me semble-t-il, à apercevoir dans les venelles de
notre capitale. Elles ne sont pas dénuées de sens mais ardues à enfiler
au quotidien. Réservées pour l'exceptionnel. Quelques K-Ways saumonés ou
lactescents soupoudrent cette présentation. Les baskets, style "All Stars",
perpétuent cette vibration de "coolitude". Elles se parent de motifs Ikat,
de toile cirée LV classique. L'embout des mocassins sont guillotinés. Les
bracelets multicolores sont réalisés à partir de mousquetons d'escalade.
Idem pour les colliers. Les matières textiles utilisées demeurent précieuses
comme les lainages rebrodés de perles en verre. Ou bien des lignes en sequins
multicolores recouvrant l'apparence d'une finition Tweed. Les poches des
robes s'accrochent latéralement à la configuration de besaces d'alpinisme.
Le sac à main se fait banane. Un dernier sac approche l'aspect du fameux
Kelly d'Hermès. Le chic investit le sac malle en croco Camel dont l'ouverture
se fait soufflet d'accordéon. Nicolas Ghesquière a œuvré, lui aussi, cette
saison sur la notion du classique revisité. Les intemporels d'une garde-robe.
On perçoit ce désir de retourner vers les fondamentaux. La veste, quatre
boutons, en tweed rouge, gansé d'un lé anthracite, incarne cette allure
de Mademoiselle. Cependant on l'enfile avec un pantalon zébré et gaufré.
L'effet zébré se calcule sur un jogging chic. Wellness. Le vocable Louis
Vuitton s'appose un peu partout : sur une étiquette en bas d'une écharpe,
en toute discrétion sur le sommet d'un mocassin, tamponné sur le cuir d'un
cadenas, en contrebas d'un long tee-shirt. Un manteau s'emberlificote de
fausse fourrure singe, mettant en valeur le tissu jacquard fleuris, digne
des plus beaux tissus de la cour du Roi Louis XIV. Sur Seng Khan. Les blazers,
bouton solo, bleu Klein ou écru demeurent dans une veine Over Size et stoppent
aux genoux. Ils se font presque pardessus. J'ai vraiment été attiré par
le travail incroyable des imprimés effets d'optique. Les fines lignes géométriques,
aux tie&dye qui se dégradent du tournesol au chocolat, du bleu ciel au bleu
nuit. Ce fameux effet Vasarely. Accouplées à un jeu savant de surpiqures
et de minuscules fils en liberté, ces pièces demeurent totalement démentes.
Des faciès, en noir & blanc, s'estampillent sur les robes du final. Des
robes mixant tonalité flashy, imprimé végétal, effet de matières (froissé,
gaufré, brillance, tricotage), ce qui les rend uniques et artistiques. Difficilement
reproductibles. Le domaine de la photographique prend toute sa splendeur
avec ces insertions de portraits sur les ultimes silhouettes. Un véritable
travail technique de reproduction textile. Pas aisé à mettre en place. De
longilignes tee-shirts soufflent cet esprit sportif sur la fin de présentation.
Ils sont agrémentés de pantalons en jacquard fleuri ou de robes en mousseline
aérienne. Des tee-shirts toujours over size. Version Arty avec les incrustations
silhouettes surmontées d'un démesuré sigle V bicolore sur Sora Choi. Carrément
British avec les sobres rayures sur Sofia
Steinberg.
Ou totalement athlétique, tel un maillot de rugbyman, dont les rayures horizontales
jaune fluo et bleu roi diffusent une allure étincelante à la chanteuse et
muse maison, Lou and the Yakuza. Elle clôture le défilé à vive allure, insufflant
cette énergie solaire, propre à la maison Louis Vuitton.
YG
Louis
Vuitton
Automne/Hiver
2022/2023
YG
YG
Loewe
Automne/Hiver
2022/2023
par Jonathan Anderson
L'art
contemporain demeure un domaine ou la fantaisie, l'imaginaire, le fantasme
peuvent imposer des concepts, des lois abstraites, des attitudes sages ou
simplement des folies pures à travers des œuvres incarnées évoquant un réel
sublimé ou chimérique. Quand l'esprit bouillonnant de Jonathan Anderson
s'attaque, une fois de plus, à l'univers artistique contemporain, on prédit
que l'originale fantaisie sera présente. Tout en générant du sens. Car Jonathan
Anderson cogite énormément pour exécuter ses concepts stylistiques. Il faut
que sa présentation raconte quelque chose d'audible pour ses invités. L'un
des seuls designers à confronter et télescoper sculpture, peinture, techniques
textiles et stylisme. Le tout pour engendrer un style vestimentaire unique,
souvent "jamais-vu". Quelle plus belle glorification que de définir ses
créations de "jamais-vu". Des citrouilles surdimensionnées se dressent sur
un sol terreux. Aride. Inanimé. Une allégorie de la terre brulée et l'appauvrissement
des terres. Seuls quelques géantes légumineuses subsistent, éparpillées
sur ce tapis presque infertile. Le top Kai Newman, telle une guerrière échappée
du film "Mad Max", foule ce vaste espace avec une robe cuirasse. Une armure
en cuir épousant ses formes tel un justaucorps. Thierry Mugler l'avait notamment
exécuté en version plastique. Monsieur Saint-Laurent en version métal doré.
Les plissés vaguelettes sont inertes. Totalement rigides. Les robes suivantes
demeurent identiques mais dans des tonalités plus claires comme le rose
pastel ou le neige. Les bottes de chantier prennent la configuration de
sacs plastique. Etrange et dérangeant. D'autres bottines ont la conformation
de quadrilatères. Probablement un bon moyen pour faire face aux déferlements
des éléments climatiques. Puis, survient "La Robe". Celle qu'on ne peut
zapper. La robe automobile, en tissu élasthanne, dont le profil dessine
le carénage d'une simple voiture. Comme si une envie folle d'enjamber une
voiture à pédale de notre enfance survenait. Dommage que Jonathan Anderson
n'ai pas poussé son concept, en immatriculant sa robe par une jolie plaque
LOEWE. Le tulle irisé, ébène ou lait, se chiffonne sur des tee-shirts cristallins.
Une autre robe en cuir, sans manches, aux découpes aléatoires, prodigue
un sentiment de nébulosité. Voire de chagrin. Comme si la fille avait été
roulée dans une cuve à pétrole. Une doudoune sur gonflée, comme une chambre
à air, attire l'œil, en sur dimensionnant sa musculature. Le haut ultra
rigide, telle une coque, maintient la silhouette d'América
Gonzalez, corsetée comme une pique. Chic et élégant. Les
robes "Bouches" sont renversantes. Jonathan Anderson est vraiment au top
de son art. La bouche, glosée vermillon, s'incruste tel un bustier, laissant
s'évanouir au sol sa délicatesse mousseline corail. Existe en version gris
béton ou fuchsia pour Loli
Bahia.
Des ballons, semi-gonflés, en plastique, s'incrustent discrètement sur des
poitrines telles des soutiens-gorge. Les pantalons peuvent surprendre aussi
par leurs constructions étonnantes. L'un s'élargit de cercles aux genoux
comme certains designs du metteur en scène Philippe Découflé. D'autres,
au niveau de la taille, se décomposent par une forme protubérante en fausse
fourrure. Presque comme l'ouverture d'un vagin. Oups. On ressent fortement
l'ode à la femme. Jonathan Anderson les aime par-dessous tout. Il les protège
et les célèbre. Une longiligne robe fluide s'estampe d'un trompe l'œil au
corps de Pin-up nue, chaussée d'escarpins talons aiguille, verni rouge.
D'ailleurs, on récupérera ces dernières, enchâssées et emboitées dans le
méandre de tulle d'une autre robe seconde peau. Une néo "Skin Dress" de
Karl Lagerfeld, vu sur son podium au début des années 90. Les trompes l'œil
peuvent dessiner une veste naïve ou des mains gantées de velours, ennoblies
par de faux ongles rouges comme sur la robe de Julia
Nobis. Des ballons, toujours à moitié dégonflés, se glissent
sous une épaule, un sein ou bien au détour d'une taille. Semi-gonflés, ils
viennent s'intercaler entre les délicates brides des escarpins ou sur des
talons. Quelle idée cocasse. Tellement divergent. Quelques rubans argentés
s'enroulent aux chevilles avec allégresse. L'art de l'agencement. Quelques
manteaux en laine bouillie se composent de nervures textiles aléatoires.
D'autres, bicolores, ont des allures de kimonos déstructurés. Des robes
aériennes bougent comme des méduses dansant au des courants de l'océan.
Les tonalités restent toujours sobres et subtiles : marron, beige, anthracite,
gris, blanc. Jonathan Anderson innove continuellement dans sa discipline.
On peut aimer ou détester. Mais, on ne peut lui ôter cette irrémédiable
envie de recherche perpétuelle, d'exploration et de création pour enfanter
de pièces consubstantielles et uniques. Il est rarement aisé de faire cohabiter
prêt-à-porter et création artistiques pures. Mais, Jonathan Anderson y arrive
à chaque fois et reste le Maestro en ce domaine.
YG
Loewe
Automne/Hiver
2022/2023
YG
YG
Miu
Miu Automne/Hiver
2022/2023
par Miuccia Prada
On
connait l'affection de Miuccia Prada pour les Arts en général. Cette passion
intense l'invite à mettre en valeur, notamment au travers de ses défilés,
le travail d'artistes d'avant-garde ou méconnus du grand public. Nathalie
Djurberg et Hans Berg ont collaboré cette saison avec Miuccia Prada. Ils
ont réalisé un film d'animation, en pates à modeler, venant titiller la
curiosité des invités. Une main squelettique, à la proportion difforme,
s'ouvre lentement, laissant apparaitre une fleur radieuse. Cette main la
touche, la malaxe, l'écrase, la caresse. Une seconde, peut-être de lotus,
s'ouvre et se ferme à l'infini. Une allégorie de la vie ; de la naissance
à la mort. Il y a un début et une fin. Comme la préparation d'un défilé.
Pour cette saison Automne/Hiver 2022/2023, l'équipe Miu Miu poursuit son
discours sur la jupe mini-mini dont le sujet avait été abordée lors de la
précédente collection (Voir article
Miu Miu Eté 2022). Cette micro-jupe en cotonnade beige avait
cartonné ce Printemps/Eté 2022, aussi bien dans la presse féminine en Vogue
que sur les réseaux sociaux. Pour cette saison hivernale, elle demeure,
à nouveau, la pièce maitresse de cette présentation. Miu Miu n'a pas tergiversé
pour réitérer ce hit vestimentaire de la saison passée. Mais, cette fois,
en version mini-jupe plissée alcalescente à la configuration de jupe de
tennis. Apposée toujours de l'inscription Miu Miu juste en-dessous du nombril.
Une version évasée, allongée aux genoux, demeure proposée à celles qui souhaiteront
une silhouette moins découverte. Toujours maintenue par une jolie ceinture
en cuir. Ou un duo de ceintures. Les ballerines de danseuses, en satin immaculé,
se rehaussent d'oblongues chaussettes blanches. Avec griffonné sur la bride
un Miu Miu graphique. Un look sportswear, un tantinet désuet. Pourquoi pas
? Après tout la mode du vintage et de la seconde main incarnent l'air du
temps. Le cou s'habille d'une filiforme et longiligne écharpe en soie unicolore.
Elle se noue simplement et prend l'apparence parfois d'une Lavallière. Les
polos tennis unicolores se galbent aux emmanchures et cols de rayures tricolores.
Aux couleurs du drapeau français. Un flashback sur les marques sportives
des Seventies tel que Le coq sportif. Un autre polo peut se morceler de
lès de délicates dentelles afin de concéder une touche plus sensuelle à
la silhouette. Moins athlétique. Miu Miu déstructure un même look : l'interminable
jupe plissée se couple d'un polo ample mais rikiki, stoppant à la lisière
du nombril. Cette zone focalise toute l'attention de cette présentation.
Il est visible tout le temps. Toutefois la grande nouveauté et, je pourrais
dire Scoop, s'inscrit dans le retour de la marque Miu Miu Homme. Une immense
joie m'envahit car cette ligne menswear était ma marque de prédilection
jusqu'à son arrêt définitif. Pour son retour sur le podium, on aperçoit
un micro short de tennis bleu marine, complété de son polo, ton sur ton,
rehaussée du logo Miu Miu sur le cœur. Avec un manteau en peau de mouton
retournée chocolat. Les derbys anthracite, épinglés d'une plaque dorée,
restent dans une veine traditionnelle. Le même look, en variante neige éternelle,
est à croquer. Un pull en cachemire, col en V, réinterprète différemment
le design des losanges "Burlington". Que l'on percevra sur plusieurs pièces
du vestiaire féminin. En gris souris ou Camel. Le blouson en cuir chocolat
s'agrémente d'un short laissant entrapercevoir un caleçon en satin noir.
Avec toujours ce fameux duo de ceintures. Un pantalon, au tressage latéral,
au point de croix, se colorie d'un adorable lie-de-vin. Peu de looks mais
totalement irrésistibles. Chez la femme, les manteaux en laine, deux boutons,
s'inscrivent dans une veine classique. En gris ou bleu marine. Le blouson
en peau de mouton retournée tabac sera parfait lors des retours des températures
fraiches. La version Boléro parait aussi attrayante. Une parka en cuir vieillit
s'ennoblit d'un col en fourrure singe immaculé. Une autre se gargarise de
strass diamant et de puzzle de python dragée sur les pourtours des épaules.
Le tartan et pied de poule, grandes tendances de l'hiver prochain, réintègrent
le vestiaire féminin en couvrant minishorts, boléros croisés, vestes over
size dans des coloris récursifs allant du marine au grège, du châtaigne
au chamois. Un tailleur, à la veste zippé, se couvre entièrement de python.
Quelques looks en cuir peuvent s'apparenter à ceux d'aviateurs des années
30. Les micro-shorts se font culottes comme sur Rianne
Van Rompaey.
Une robe, sans manches, à la configuration de filet de pêche, s'enorgueillit
de broderies en strass diamant. Ca brille. Elle s'enfile par dessus un micro
top en mousseline bleu nuit et d'une culotte cuivrée. Une autre version
investit un caraco et jupe mi-longue. Les strass seront assidus sur les
looks de soirée. Une mousseline paille se brode de diamant et broderies
florales irisées. La version chamallow de Pasha
Arulia reflète presque, à quelques tonalités près, la
couleur de ses cheveux. La version sur Selena
Forrest demeure beaucoup plus ténébreuse et sombre. Mais,
non moins aguichante. Toutefois, quand les robes, toutes en transparence
se mélangent de strass diamant, de mousseline rose ou bleu pastel et de
dentelle dorée, ce patchwork incongru explose à la vue de tous comme une
pyrotechnie textile des plus inouïes. Comme sur le top mexicain Issa
Lish. Un vestiaire juvénile, athlétique et extravagant
qui pourra, au delà d'une simple saison, adopter aisément d'autres pièces
passées et futures de la maison Miu Miu. De véritables intemporels.
YG
Miu
Miu
Automne/Hiver
2022/2023
YG
YG
Paco
Rabanne Automne/Hiver 2022/2023
par Julien Dossena
Cette
saison, la maison Paco Rabanne a osé suggérer une présentation sous l'égide
d'une pause méditative prolongée. Quelle idée formidable, rarement tentée.
Avec une musique apaisante, adoucissante, ponctuée de longues respirations
sonores, ces dernières se diffusent tel un lent narcotique tout le long
de la présentation. On plane. On divague. On se laisse transporter vers
un ailleurs. Il y a presque un début de transe. Redondante, la mélodie favorise
un sentiment presque de paix et de recueillement intérieur. Un bien-être
sincère lorsqu'elle demeure couplée aux jeux de lumières incessants, oscillant
entre le parme et le mandarine, le jaune solaire et le pamplemousse. Des
Tie & Dye harmonieux. Un véritable voyage intérieur pour ceux qui désireront
ouvrir leurs chakras. Les chakras de la mode, bien évidemment. On demeure
plongé, pendant dix minutes, dans une perception alternative de levés et
couchés de soleil. Des faisceaux lumineux bienfaisants. Une voix monocorde
répète à l'infini "Right Now, right now, right now". C'est maintenant qu'il
faut prendre soin de soi, profiter de la vie, éveiller son être intérieur,
tout en maintenant une attention assidue aux proches qui nous entoure. Le
designer Julien Dossena a finement joué cette carte du positivisme en propulsant
la collection Automne/Hiver 2022/2023 vers des dimensions supérieures. Akon
Changkou
ouvre avec clémence ce show attendu. Son look combine l'idée d'une robe
chemise, anthracite, agrémentée d'une sur-jupe, taille haute, peut-être
réalisée en tweed moucheté gris souris. Avec ses babies argentés, effilées,
Akon possède tous les codes vestimentaires d'une adolescente bien comme
il faut. Sofia
Steinberg
la suit avec son allure rentre dedans. Fonceuse, elle porte une robe en
mousseline, imprimé bouquets, dont les manches fleurent presque les limites
des mains. Son col immaculé, en épaisse dentelle, prend la configuration
de "pelles à tarte". Un corset, losange bleu ciel, enserre sa taille. On
ne discerne pas si celui-ci demeure intégré au look ou est superposé. Effet
d'optique. Il y a presque une alliance appropriée entre rigueur et délicatesse
assumée. Le top América Gonzalez se voit affublé d'une combinaison pantalon
ébène dont le corset Ciel prend le pourtour d'un "Panty". Julia
Nobis dévoile une robe rose bonbon dont la partie supérieure
s'inspire d'uniforme de gymnaste, véritablement seconde peau. En élasthanne
probablement. Puis, la partie inférieure se modifie vers une configuration
"corolle". Les manches ultra-longues ne laissent plus apparaitre le bout
des doigts lorsque Mao Xiaoxing enfile son top seconde peau argentin, rebrodé
de laconiques pois miroir. Beaucoup de jupes courtes pour cet hiver. Des
volants aussi qui se chevauchent, se superposent. Il y a du volume. On s'en
amuse. Peut-être un moyen inconscient de garder encore un peu ses distances.
Les épaules sont resserrées et étranglées. Quelques ensembles se construisent
d'une seule et même pièce, même si elles laissent transparaitre le contraire.
Les jupes se fendent sur la cuisse. J'adore la robe bustier d'Ashley
Radjarame
qui laisse apparaitre discrètement, sur le pourtour de la poitrine, un lé
en fer argenté. Comme un lien discret entre passé et présent de la maison.
Un point essentiel de l'écriture stylistique de Monsieur Paco Rabanne. Le
gilet en mohair Beige, tout doux, à la dizaine de petits boutons dorés,
recouvre des couleurs Tie & Dye sur ses périphéries. Des sequins anthracite
investissent le look de Giselle
Norman.
Sa jupe se gonfle, enfle. Dans le dos, un nœud démesuré, toujours en sequins,
chute avec grâce sur son séant. La taille demeure souvent marquée. Les boucles
d'oreilles d'Oudey Egone évoquent presque la forme de gramophones. Métal.
Finalement, Julien Dossena intègre, lors de cette présentation, des détails
stylistiques redondants avec notamment les manches bouffantes, traines,
volants qui s'amoncellent, froufrous, cotonnades en dentelle, mohair, jupes
fendues et jeux de plissés. Sans omettre l'identité primordiale de la marque
: le fameux métal argenté qui prend, ici, une fluidité déconcertante. Que
l'on découvre notamment sur les dernières robes de déesses grecques en couleur
argenté, rosé et doré. Un vestiaire féminin dont le bien-être corporel demeure
le maitre mot.
YG
Paco
Rabanne
Automne/Hiver
2022/2023
YG
YG
Prada
Automne/Hiver 2022/2023
par Miuccia Prada et Raf Simons
Un
casting du feu de dieu fusionnant d'anciennes muses maison avec la génération
des milléniales, mais quelle pourrait-être la maison italienne ultra pointue
pouvant relever ce défi ardu ? Un seul et unique nom me traverse l'esprit
: Prada. Quel réel plaisir de scruter à nouveau toutes ces magnifiques silhouettes,
à l'élégance captivante, sur ce podium de l'Automne/Hiver 2022/2023. Pour
nommer les essentielles, on peut épeler les délicieux noms d'Amanda
Murphy, Arizona
Muse, Elise
Crombez, Emily
Sandberg, Erin
O'Connor, Hannelore
Knuts, Irina
Kravchenko, Kinga
Rajzak, Marina
Perez, Liya
Kebede, Querelle
Janssen ou Suvi
Koponen. Toute une myriade de filles qui ont fait leur
classe chez Prada, de la fin des années 90 jusqu'aux années 2010. Sans omettre
de prononcer les noms des stars actuelles des podiums : Kaia
Gerber, Kendall
Jenner, Mica
Arganaraz, Rianne
Van Rompaey,
Lina
Zang, Julia
Nobis, Anok
Yai ou He
Cong. Un choc des générations. Prada veut absolument transmettre
le message que sa mode demeure avant tout un style "transgénérationnel".
Pour finaliser ce casting dément, la comédienne de la série Euphoria, Hunter
Schaffer, muse actuelle de la maison, clôt le défilé. Au delà de ce casting
rêvé, la maison Prada a souhaité emmener ses invités dans univers onirique,
chimérique. Avec un décor pouvant résulter d'un film d'anticipation, caractérisé
notamment part ce longiligne tunnel agrémenté de néons parmes et de grilles
en métal argenté, le tout rehaussé par une moquette feutré, de couleur moutarde,
l'agencement des focales lumineuses dessinent cet interminable Z sur l'ensemble
du podium. Un Z comme Zénith. Car Prada est au Zénith. C'est Kaia
Gerber qui ouvre le show, avec cette allure un peu mutique.
La simplicité de ce premier look touche. Marcel lactescent, pimenté par
un simple logo métallique Prada s'accolant entre la poitrine. La jupe s'édifie
autour de trois bandes latérales de tissus disparates: lainage gris souris,
satin noir, gaze transparente brodée de perles jaune canari s'agitant et
vacillant en tous sens. Les looks suivants insistent sur un tailoring maitrisé.
Les manches demeurent longues. Les épaules sont parfaitement ajustées. Les
jupes, au dessous des genoux, demeurent toutes transparentes. Les sous-pulls,
col cheminé, seront le hit de la saison. Surtout avec l'inscription, en
fines lettres, de la marque. Comme un mini tatouage. Les escarpins continuent,
comme la saison précédente, à fendre l'air tellement ils demeurent effilées.
Amanda
Murphy porte un Marcel blanc et une simple culotte. Mais,
la touche stylée s'inscrit dans la superposition de ces deux pièces avec
une robe en gaze transparente, sans manches. Cela crée un effet de matière
innovant et peu vu. Les broderies "Flashy", dans des tonalités Mandarine
ou Canari, permettent de les dissocier plus clairement grâce à cette gaze
chiffonnée. Les robes/manteaux, d'envergure classique, incorporent un jeu
de perles argentés s'enroulant autour du cou. Celles-ci se fixent par une
broche triangulaire au logo Prada. Le gris s'appose discrètement sur l'ensemble
du vestiaire. Un gris usité par le secteur tertiaire. Un gris de travail.
Le pull, col en V, efface les épaules par sa carrure bien trop ample. Une
jupe plissée s'évase telle celle que Christian Dior avait dessinée après
la seconde guerre mondiale. Le bombers Oversize de Sherry Shi se brode de
nombreuses fleurs en rhodoïds, ton sur ton. J'exalte. En vert Kaki sur Julia
Nobis. En bleu nuit sur Kendall
Jenner mais cette fois avec des plumes. Le tout porté
toujours avec ces fameuses jupes en gaze limpide. Kinga
Rajzak enfile un lourd manteau en cuir kaki à se damner.
Il a presque la configuration des trenchs militaires de la guerre 39-45.
En chocolat pour Hannelore
Knuts. En ébène, pour Arizona
Muse et Querelle
Janssen. Mais, le même manteau, version rose Barbie d'Emily
Sandberg sera, certainement, pris d'assaut par toutes les fashionistas
et influenceuses Mode. L'impact visuel reste dément. Trois pulls en cachemire
se dénotent par leurs imprimés ancestraux et reconnus: le fer à cheval ou
U, les mosaïques olivâtres et châtaigne et les polyèdres de plusieurs couleurs.
Quelques manteaux et vestes se recouvrent sur les emmanchures de fourrures
synthétiques dans des tonalités vert pomme, rose tendre ou bleu layette.
Avec des plumes, sur les vestes d'América Gonzalez et Mica
Arganaraz. Quelques
blousons aviateurs finissent d'achever ce vestiaire idéal. Les sacs triangulaires
s'accrochent en duo. Une présentation rondement menée par Miuccia Prada
et Raf Simons. Une garde-robe qui invite à se projeter totalement dans l'ensemble
de tous ces looks hivernaux qui persistent à être originaux et novateurs.
Avec toujours une touche
décalée et de folie maitrisée. Prada m'émerveillera toujours.
YG
Prada
Automne/Hiver
2022/2023
YG
YG
Saint-Laurent
Automne/Hiver 2022/2023
par Anthony Vacarello
"Sans
élégance de cœur, il n'y a pas d'élégance" aimait à répéter Monsieur Yves
Saint-Laurent. C'est terriblement vrai. Monsieur Saint-Laurent était dans
la prospection de cette quête perpétuelle pour essayer d'atteindre cette
grâce ultime. Une élégance qu'il réinterprétait chaque saison à la guise
de son inspiration du moment. Toujours chic. Jamais vulgaire. Que la femme,
dont il rêvait et revêtait, puisse s'incarner aisément dans des créations
toujours audacieuses, respectueuses de son anatomie et sa personnalité,
mais dans l'air du temps. Cette saison, Anthony Vacarello s'est attaqué
à l'allure identitaire d'Yves Saint-Laurent. Pas de Saint-Laurent. D'Yves.
Un travail ardu à réaliser car il ne faut pas tomber dans la réplique. Toutefois,
le designer s'est transcendé en ouvrant son cœur comme jamais afin de rendre
hommage à l'écriture stylistique d'Yves Saint-Laurent. Tout en insufflant
sa personnalité. Le cadre magnifique, tour Eiffel en toile de fond, permet
cette touche de magie. Dans un immense caisson, entouré de baies vitrées
à 360 degrés, se déploie un salon rectangulaire agrémenté d'une moquette
beige poudré. Peut-être " Nude ". Une estrade alcalescente accueille les
invités. Placés à divers paliers, ceux-ci peuvent observer la vie nocturne
sur les jardins du Trocadéro ou sur la tour Eiffel scintillante. La vue
sur le monument iconique étant réservés à quelques VIPs dont l'icône Catherine
Deneuve, la muse de Saint-Laurent Betty Catroux ou l'actrice Salma Hayek
et son mari, PDG du groupe Kering, Francois Pinault. La bande son diffuse
des airs d'opéra classiques remastérisés. La première silhouette, caban
en cachemire ébène et longiligne robe en satin blanc, résume déjà l'esprit
de la collection : noir et blanc seront les couleurs prédominantes. Un vestiaire
minimalisme qui allie fluidité et simplicité. Un vestiaire qui permet de
focaliser sur les accessoires maisons : lunettes de soleil ; bracelets en
argent, en bois foncé, en simili ivoire ; boucles d'oreilles géométriques,
en argent ou Or. Mais, aussi, sur les escarpins, talons aiguilles, aux fines
brides diamantées. Strassées. Le trench en cuir sombre descend aux genoux.
Une robe col cheminé recouvre l'ensemble de la silhouette. La multiplicité
des bracelets en argent, couplé à d'autres plus sombres, en fait l'attrait.
Rigueur. Sobriété. On recouvrera ce même look, en fin de présentation, en
version incolore. Il y a une frugalité dans le style qui permet de focusser
à l'essentiel. C'est à dire les lignes, les formes. Une robe élancée, chocolat,
seconde peau, s'enorgueillit de légers plissés sur le corsage créant un
effet double losanges sur le buste. De la fausse fourrure habillent quelques
manteaux, gabardines. Très similaire aux looks de Catherine Deneuve dans
le film "Les prédateurs" de Tony Scott. Celle-ci peut galonner certaines
pièces. Les cols peuvent être surdimensionnés, véhiculant cet effet de Power
Girl. Comme sur le top australien Adut
Akech.
Anthony Vacarello exécute une silhouette qui s'achève, souvent, par une
robe ou une jupe en transparence, notamment lorsque le mannequin saisit
un manteau, veste ou caban. Il y a presque une idée canaille. Si on se démet
du haut, probablement, le reste laissera apparaitre des dessous plus affriolants.
Un perfecto se pare de peaux d'alligators laquées. Ce dernier peut se compléter
par une longue robe en mousseline volantée ou de satin noir. On pourra,
aussi, opter pour un legging ténébreux en satin. Certaines épaules peuvent
être marquées par un jeu d'épaulettes. Mais à bonne escient. Le trench de
Mona
Tougaard
peut se faire robe lorsqu'il est ceinturé au niveau de la taille. Une rose
noire accrochée sur le cœur. Toujours avec une jupe en transparence jusqu'aux
chevilles. Laissant dévoiler les sublimes escarpins à la bride strassée.
Loli
Bahia, toujours à l'allure hiératique, porte un perfecto
en cuir prolongé jusqu'aux genoux. Miriam
Sanchez
se pare à merveille de cette oblongue robe plissée, seconde peau, scalpé
par deux triangles au niveau de la taille, maintenue par une rose immense
au nombril. La version émeraude se fait fourreau. La version anthracite
offre un décolleté qui n'aurait pas déplu à Mr Saint-Laurent. Avec une immense
rose parme à la croisée du vertigineux dénudé. Un manteau en mouton retourné,
aux larges emmanchures, donne toute sa prestance à une femme sexagénaire.
Saint-Laurent pour toutes les femmes. On récupère aussi les fameux leggings
et léotards qu'Anthony Vacarello avait promulgué lors de sa collection Latex.
Ici, en version anthracite et élasthanne, ils paraissent plus aisés à enfiler.
La panne de velours, tissu sophistiqué, est utilisée pour un ensemble pantalon
soyeux porté par Seng Khan. La jeune Marie Kippe, cheveux roux tout courts,
dénote avec son ensemble en dentelle fleurie ébène. Top au col cheminé,
sans manches, et simple pantalon laissant apparaitre toute sa frêle silhouette.
Avec une culotte noire basique. Ouf, on est sauvé. Quelques transparences
maitrisées sur la robe de Rianne
Van Rompaey
ou Esin Bicak, image Maison pour le Printemps/Eté 2022. En tout bien tout
honneur. Le smoking s'offre deux versions : robe manteau ou classique. Avec
un coup de cœur pour la démarche d'Omahyra
Mota qui joue la garçonne comme personne. Enfin, elle
ne le joue pas, elle l'incarne. Les filles Saint-Laurent de cet hiver auront
toutes une classe folle. On se délecte distinctement de ce fameux chic parisien.
Anthony Vacarello a réussi à créer, avec brio, une collection Automne/Hiver
2022/2023 qui aurait pu jaillir de l'imagination folle de Monsieur. Ce dernier
l'aurait adoubé. Mais, il faut rendre à César ce qui est à César. Anthony
Vacarello à performer lors de cette présentation et a su tendre vers cette
élégance tant recherchée. Surement, le temps et l'expérience ont su bonifier
son âme créatrice. Merci Monsieur Vacarello d'avoir honoré l'essence même
de la maison Saint-Laurent.
YG
Saint-Laurent
Automne/Hiver
2022/2023
YG
YG
Valentino
Automne/Hiver 2022/2023
par Pier Paolo Piccioli
Le
Rose & le Noir aurait pu être le titre évocateur pour condenser en deux
mots la présentation Valentino Automne/Hiver 2022/2023. Réducteur peut-être.
Un tantinet littéraire. Voire "Stendhalien". Pier Paolo Piccioli a surtout
souhaité sublimer une tonalité singulière pour la garde-robe hivernale :
le rose fuchsia/magenta. Une tonalité spécialement conçue pour cette collection.
Les silhouettes pétrole venant contrebalancer cette note "colorielle" étincelante.
Le dossier de presse simplifie son propos en notifiant "The Pink Collection".
Quatre-vingt-un looks dont trente-trois Anthracite. La salle du carreau
du temple a été entièrement repeinte en magenta. Murs, sol, colonnes, estrade.
Magenta, magenta, magenta. On en veut partout. Pier Paolo Piccioli ne souhaite
aucunement diluer son concept stylistique. Il va droit au but. On affirme.
On matraque. On rajoute. Une tonalité disséquée, décortiquée, répétée. Pourtant,
au sein de nos sociétés contemporaines, dites évoluées, le rose a longtemps
répondu à une connotation féminine. En gros, le rose pour les filles et
le bleu pour les garçons. Ici, le discours demeure transposé, rectifié.
Cette sphère a été totalement raturée pour se surélever vers une autre plus
ouverte. Une couleur n'appartenant plus à un seul genre mais à tous : femmes,
hommes, trans, non-genrés. L'ouverture d'esprit prime. Toutefois, dans notre
monde terre à terre, il prendra beaucoup plus de temps à s'imposer. C'est
ainsi. Le casting demeure totalement métissé avec une diversité de couleurs
de peaux. Totalement inclusif par ses différences d'âge, notamment en croisant
les modèles Violetta Sanchez, Penelope Tree ou Kristen McMenamy. Une présentation
ou la majorité des invités se jettera avec gloutonnerie sur des vêtements
aux saveurs de délicieuses confiseries. Etant donné que le fuschia prédomine,
il n'est plus question, ici, d'imprimés, de tie & dye, de tartans, de carreaux
ou de fusion de couleurs. On se focalise sur les formes, les tombés, les
découpes, les jeux de matières, les broderies, les agencements stylistiques.
Si l'aversion pour le magenta parait trop forte, la maison Valentino propose
de se réorienter sur trente-trois sublimes looks entièrement ébène. Obscur
et ténébreux. C'est le mannequin Mary Ukech qui foule la première ce sol
fuchsia. Elle sublime cette interminable robe dont le bustier forme une
savoureuse vague. Divine. Le balconnet à fines bretelles, du second look,
est rikiki. Juste de quoi cacher la poitrine. Avec un nœud rectangulaire.
La jupe s'évase aux mollets pour dévoiler les étonnants escarpins compensés,
élançant la silhouette comme jamais. Le manteau suivant apparait d'une simplicité
déconcertante. Epaules légèrement tombantes, il se noue à la taille par
un étroit mais longiligne nœud rectangulaire. Une chemise en mousseline,
col Mao, manches bouffantes, laisse croustiller la totalité du buste de
la demoiselle. Son pantalon large laminant le sol avec déférence. La mini
robe crinoline est à se damner. Elle dessine des jambes de gazelles. Des
mousselines transparentes laissent découvrir quelques poitrines mais aussi
des pectoraux bien dessinés. Des découpes au bistouri peuvent lacérer un
bustier en un effet bondage, finalisées par un jeu de charmants nœuds. Des
aplats de fleurs s'intercalent sur une minirobe entièrement pailletées de
sequins. Un fourreau se bâtit autour de coroles s'apposant les unes auprès
des autres. Un rendu complètement couture. Un gigantesque manteau, en taffetas,
s'offre un feu d'artifice de gerbe de plumes d'autruche. Une vision suspendue
comme une nuée de nuages. Une collection sensationnelle qui restera dans
les anales. Un fuchsia magnifié. Un magenta exalté. Un rose tout simplement
honoré chez Valentino pour cet Automne/Hiver 2022/2023. Probablement, et
cela peut sembler cliché, mais après tous les cataclysmes planétaires, Pier
Paolo Piccioli a surement désiré voir la vie en rose. Quelle idée saugrenue
mais merveilleuse. De célébrer le bon côté de la vie. Le rose n'apparaissant
pas comme une couleur aisée à enfiler tous les jours, montre qu'avec un
peu d'audace, on peut la sublimer, la transcender. Une ode magistrale. Une
déclaration d'amour.
YG
Valentino
Automne/Hiver
2022/2023
YG
YG
Défilés
Printemps/Eté 2022
Par Yann Gabin
pour PlaneteMode.com